Robert Silverman
Un livre rend hommage à Bob Silverman, militant du vélo à Montréal dans les années 1970. Photo: courtoisie Presses de l’Université d’Ottawa

La Ville de Montréal rendra hommage à Robert Silverman, dit Bicycle Bob. Elle donne son nom à une des pistes cyclables du Réseau express vélo (REV). Quelques semaines plus tard paraîtra un ouvrage pour raconter la vie de cette figure emblématique de Montréal.

Stéphane Desjardins, journaliste et écrivain, qui a bien connu le personnage, signe avec John Symon, Bob Silverman Vélorutionnaire.

Il n’y a pas de rapport entre les deux initiatives. Mais ce livre arrive au moment où le conseil municipal de Montréal nommera officiellement le 22 septembre l’axe Berri-Lajeunesse-Saint-Denis du REV «piste Robert-Silverman». Cette voie réservée aux vélos s’étend à travers les quartiers du Plateau-Mont-Royal, de Rosemont-La Petite-Patrie, de Villeray-Saint-Michel-Parc-Extension ainsi que d’Ahuntsic-Cartierville.

«Il y a un autre lien à faire entre Bob Silverman et le territoire du Journal des Voisins (JDV). J’ai grandi à Cartierville sur la rue Saint-Évariste. À l’époque, je m’étais engagé dans le Monde à bicyclette, l’organisme que Bob avait créé», raconte M. Desjardins, en entrevue avec le JDV.

C’était à la fin des années 1970 et Stéphane Desjardins, âgé à l’époque de 18 ans, militait pour plus de place au vélo.

L’action de M. Silverman s’inscrivait dans un mouvement plus large. Celui-ci se développait en Europe, notamment aux Pays-Bas et dans les pays scandinaves. Il voulait offrir des espaces sécuritaires aux cyclistes dans les grandes villes.

«Dans les années 1970, c’était absolument l’horreur. C’était une guerre contre le vélo, littéralement. C’était très dangereux. Il y avait des accidents quasiment chaque semaine. Alors, on a demandé des pistes cyclables, des places de stationnement et le droit d’embarquer dans le métro avec son vélo», se rappelle M. Desjardins.

Spectacle de la contestation

Et pour faire passer le message, Bob Silverman ne manquait ni d’imagination ni d’humour.

«On faisait des manifs cyclothéâtrales, pour évacuer les cyclofrustrations. On faisait des événements colorés. Bob se déguisait en Moïse pour fendre les eaux du Saint-Laurent et nous permettre de pédaler jusque sur la Rive-Sud. Dans les années 1970, il n’y avait pas moyen de le faire», souligne l’écrivain et journaliste.

Il fallait faire comprendre que l’auto était dangereuse et que le vélo n’avait pas encore sa place dans la ville.

«On a même fait des die-in sur l’avenue du Parc, sur la rue Sainte-Catherine et sur le pont Jacques-Cartier. Les cyclistes arrivaient à un endroit sans avertir personne. Puis ils se couchaient sur le sol.»

Toutefois, ces actions forçaient le passage sur des chaussées où il n’était pas permis de circuler à vélo.

«J’ai même été arrêté. On a fait de la prison, Bob et moi, quelques heures», se souvient M. Desjardins.

Une vie à vélo et plus encore

C’est cette histoire de militantisme que M. Desjardins raconte avec John Symon.

«Pour Bob, c’était le modèle de développement urbain étendu aux banlieues, basé sur l’automobile, qui était un non-sens écologique, social.»

Il dénonçait la dépendance à l’automobile et la tendance culturelle à faire de la voiture un mode de vie très nord-américain.

«C’est sûr qu’en Amérique du Nord, on est vraiment le fer de lance de la culture de l’automobile. C’est Suburbia», illustre M. Desjardins.

Pour l’auteur, il ne fait aucun doute aujourd’hui que Montréal, capitale du vélo en Amérique du Nord, doit beaucoup à Robert Silverman.

«Son rêve c’était d’avoir la première véritable piste cyclable utilitaire à Montréal.»

Le livre qui raconte la vie de M. Silverman va bien au-delà d’une biographie.

«Bob est un personnage de cinéma ou de roman. Dans les années 1960, il avait fondé une librairie où il y avait un café et des spectacles.»

Le premier spectacle que Bob Dylan avait présenté en dehors des États-Unis c’était à la librairie de Robert Silverman.

Un homme de convictions

M. Silverman était aussi un grand voyageur. Militant de gauche convaincu, il avait vécu à La Havane, à Cuba. Il avait rencontré Che Guevara.

«Juif montréalais, Bob était communiste et il avait toujours voulu rapprocher les Juifs et les Palestiniens», relève M. Desjardins.

Il avait serré la main à Yasser Arafat. Une situation qui lui vaudra un drame.

«Cela l’avait mis au ban de sa propre famille pendant un certain temps», confie l’auteur de Velorutionnaire.

Ces hommages qui se superposent viennent certainement rendre justice à un homme méconnu des jeunes générations. Le nom d’une piste cyclable et un livre réhabilitent sûrement une mémoire collective qui aurait pu s’avérer défaillante.

Bob Silverman, Vélorutionnaire par John Symon et Stéphane Desjardins. Publié aux Presses de l’Université d’Ottawa, octobre 2025.



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