
En 1994, Azzedine Achour quitte précipitamment, avec femme et enfants, son Algérie natale pour trouver refuge à Montréal grâce au réseau Pont Québec-Algérie mis en place en France dans le cadre d’une initiative menée notamment par le sociologue français Pierre Bourdieu pour venir en aide aux Algériens réfugiés de la décennie noire.
Depuis, la vie de cet économiste de formation s’est confondue avec l’évolution de l’action communautaire dans notre quartier. D’abord comme directeur du CANA, et ensuite comme directeur de la table de concertation Solidarité Ahuntsic, poste qu’il a occupé de 2001 jusqu’à sa retraite en 2018.
Ce parcours marqué par un dévouement infaillible au service de la communauté lui a valu de figurer dans le Livre d’or d’Ahuntsic-Cartierville en reconnaissance de ses contributions à des projets majeurs dans le développement social du quartier. « C’était un moment fort en émotion », confie Azzedine Achour à propos du vibrant hommage que lui ont rendu les élus de l’arrondissement par des témoignages qui l’ont touché profondément.

« On était parti de loin »
« Je suis tombé dans le travail communautaire par la force des choses », dit Achour au JDV en revenant sur ses premiers pas pour intégrer son nouveau pays. Sa porte d’entrée a été le bénévolat, notamment en matière de francisation des nouveaux arrivants au sein du Carrefour d’aide aux réfugiés de Sainte-Croix, dont il assure la direction après le départ de sœur Andrée Leblanc. « J’appréciais ces contacts quotidiens avec des personnes de tous horizons qui faisaient tout leur possible pour réussir leur ancrage dans cette Belle Province francophone », se rappelle-t-il.
Avec un penchant naturel pour le contact humain et une prédisposition pour le travail social due à sa vie militante pour les valeurs humaines dans son pays d’origine, Azzedine prend vite goût au travail communautaire, pour lequel il développe une véritable passion qui ne s’est jamais affaiblie.
« Ce n’était pas un job. C’était une passion, une forme d’engagement au service de la communauté », affirme Achour. Il se réjouit du développement remarquable qu’a connu le secteur communautaire, lequel bénéficie actuellement de l’existence d’organismes bien structurés et dotés de règles de fonctionnement bien définies.
« On était parti de loin. Le travail qui se faisait autour des réfugiés et des immigrants était basique. On répondait au service minimum. Mais ces nouveaux Québécois aspiraient à évoluer en tant que citoyens à part entière », note celui qui compte parmi les acteurs communautaires d’avant-garde qui ont contribué à transformer les organismes charitables affiliés à des congrégations religieuses – lesquelles jouaient, bien entendu, des rôles déterminants dans la lutte contre la pauvreté et la protection des réfugiés – en organismes communautaires sans affiliation religieuse.
Beaux défis
Achour revient sur le contexte de la naissance de la table de concertation d’Ahuntsic. « Solidarité Ahuntsic n’est pas née dans la douceur », rappelle-t-il. Il s’attarde sur les « négociations fermes » entre les organismes fondateurs de cette table de concertation, et souligne notamment la mobilisation des organismes communautaires revendiquant une loi sur l’action communautaire autonome ainsi que les négociations de longue haleine pour doter le quartier d’un plan stratégique de développement social.
Il évoque les beaux défis du travail communautaire avec, en premier ordre, « réussir à mobiliser toutes les forces vives d’un quartier autour d’objectifs concrets et bien définis pour lesquels tout le monde travaille, quelles que soient l’appartenance institutionnelle (publique ou privée) ou les couleurs politiques. » Il faut dire à cet égard qu’Achour et ses compagnons ont assuré avec brio.
Selon lui, cet effort rassembleur est le garant de l’avenir des organismes communautaires, qui doivent surtout éviter de se renfermer sur eux-mêmes. « C’est cet effort rassembleur qui a permis d’avoir l’écoute attentive des administrations à tous les échelons (local, provincial et fédéral) et un accès facile aux élus, dit-il. Les politiques ont fini par comprendre l’importance d’être plus proches des organismes communautaires et de reconnaître leur contribution, notamment pour avoir une bonne connaissance des réalités sur le terrain afin de répondre adéquatement aux besoins socio-économiques de la population. »
À ce propos, Azzedine Achour note qu’une de ses grandes satisfactions est d’avoir contribué à doter le quartier d’un plan stratégique de développement social, résultat d’un long processus de concertation laborieuse.
Abordant les perspectives d’avenir, Achour demeure confiant dans la capacité des organismes communautaires à se renouveler et à mettre en place les relèves qui porteront avec bonheur l’engagement communautaire et en assumeront les exigences. Pour cela, il insiste sur le devoir de renforcer la démocratie réelle dans le fonctionnement interne des organismes.
Cet article a été publié dans la version papier du JDV d’août 2025.
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