Voilà que les vacances estivales sont commencées et vous vous apprêtez peut-être à quitter Ahuntsic-Cartierville pour mettre le cap sur les Maritimes, le Sud ou carrément sur un autre continent. Et pourtant ! Au 19e siècle et jusqu’à la moitié du 20e siècle, Bordeaux-Cartierville et Sault-au-Récollet étaient bel et bien des destinations prisées où l’on venait établir ses quartiers d’été. Lumière sur un pan d’histoire probablement méconnu de notre arrondissement.
Vous ne l’auriez peut-être pas soupçonné, mais une bonne partie de notre arrondissement était à cette époque-là, pour les estivants, synonyme de vacances à la plage et de ressourcement en campagne.
« Au départ, la villégiature est une affaire de bourgeois de Montréal. Ces derniers se font construire des villas sur les bords de la rivière des Prairies. Le secteur de la rue Somerville et Park Stanley est un exemple de bâtiments plus imposants qui ont servi à la villégiature. Par la suite, avec l’arrivée du tramway et l’amélioration toute relative des conditions de travail pour les familles plus modestes, le nord de l’île devient plus attirant pour une plus large partie de la population. On vient au Sault-au-Récollet et dans Bordeaux-Cartierville pour être à la campagne », résume un porte-parole de la Société d’histoire d’Ahuntsic-Cartierville au journaldesvoisins.com.
Évolution de la villégiature
Une lecture partagée par l’animateur historique, chercheur et conteur Stéphane Tessier, qui distingue pour sa part trois périodes caractéristiques de la villégiature dans nos quartiers.
La première période débute autour de 1876 et concerne une population fortunée majoritairement anglophone et qui, contrairement à l’ouvrier, a en cette période de révolution industrielle les moyens de s’offrir des vacances dans l’un des multiples hôtels de notre territoire. D’après M. Tessier, les hommes d’affaires montréalais de l’époque disposaient, en outre, de pieds à terre dans Saraguay, Bordeaux ou encore Ahuntsic, où ils venaient séjourner l’été.
Stéphane Tessier situe ensuite la seconde phase de villégiature autour du début du 20e siècle, après l’arrivée du tramway – en 1894 au Sault-au-Récollet et en 1895 à Cartierville – qui permet ainsi de démocratiser l’accès aux espaces verts.
Enfin, c’est par la troisième vague – autour des années 1920 – avec l’amélioration du réseau routier et l’essor de
l’automobile que se produit véritablement l’éclosion du « tourisme d’une journée » pour une clientèle plus populaire.
« Ce sont des gens qui vont à la plage, qui vont se divertir et qui vont revenir en fin de journée. On va retrouver cela surtout à Laval, sur la rivière des Prairies », indique M.Tessier.
Activités estivales
Côté vacanciers fortunés, dès le 19e siècle, on affectionne particulièrement le club de chasse Montreal Hunt Club situé dans Cartierville.
Le club de canotage du quartier rencontre également un vif succès auprès de cette clientèle, qui le fréquente alors tant pour faire de la compétition que comme moyen de réseautage, explique M. Tessier.
Au début du XXe siècle, la démocratisation progressive du loisir favorisera quant à elle l’essor de l’industrie de la patate frite et du hot-dog.
Toutefois, sur toute cette période, l’attrait principal qu’exerce le territoire sur tous les vacanciers – quelle que soit leur classe sociale – est d’abord environnemental. On se rend au nord de Montréal avant tout pour la nature et pour prendre le frais, à une époque où les conditions de vie urbaine étaient particulièrement déplorables, fait valoir Stéphane Tessier.
Des villages urbains
« Au début du XX e siècle, le Sault-aux- Récollets, Ahuntsic, Bordeaux et Cartierville recevaient des citadins dans des chalets d’été construits le long de la rivière des Prairies. Certains louaient leurs maisons. À cette époque et jusqu’aux années 1950, ces quartiers étaient des villages urbains », raconte Robert Laurin, médecin retraité, qui a vécu dans Cartierville de 1930 à 2002.
À l’époque, son grand-père – qui résidait également dans Cartierville – louait d’ailleurs un logement pour l’été aux parents du célèbre violoniste et chef d’orchestre André Durieux.
Parmi les lieux prisés de l’époque par les estivants, M. Laurin cite le parc Belmont, « où on louait des chaloupes » et qui attirait déjà les vacanciers à ses débuts pour son caractère champêtre, bien avant que n’y soient installés des manèges.
Dans les années 30-40, c’est à la plage publique du parc Raimbault, la « Rainbow Beach », que se pressaient les citadins, d’après M. Laurin, qui note toutefois qu’à l’époque les plages étaient surtout localisées à l’Abord-à-Plouffe (Chomedey).
« L’hôpital du Sacré-Coeur, sanatorium de plus de 500 lits, est une autre institution qui amenait de nombreux visiteurs, surtout le dimanche », conclut M. Laurin.
De quoi brosser un portrait vivace des étés d’antan!
Cet article a d’abord été publié dans le mag papier du jdv à l’été 2016, et mis à jour par Christiane Dupont en juillet 2018.
Pour en savoir plus sur le sujet, on peut consulter le site Web de l’historien, guide et animateur, Stéphane Tessier.
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