Duplex érigé à la fin des années 1950 par la Coopérative La Familiale, une coop d’accès à la propriété aujourd’hui disparue, angle des rues de Louvain et André-Grasset, dans le quartier Saint-Sulpice. (Photo: François Robert-Durand, JDV)

 

Pour bien des gens, l’accès à la propriété devient de plus en plus improbable avec l’actuelle flambée des taux hypothécaires. Les choses n’ont pas toujours été plus roses.

Cet article est paru dans la version imprimée du Journal des voisins,
le Mag papier de juin-juillet 2023, à la page 27.

Après le krach boursier de 1929 et la Grande Dépression, puis le rationnement exigé par la Seconde Guerre mondiale, la construction et la rénovation de logements ont connu un ralentissement majeur pendant une vingtaine d’années. Une partie importante des habitations existantes avant 1930 tombe en désuétude, des quartiers se taudifient. La disponibilité de logements de qualité est très limitée au moment de la relance économique d’après-guerre.

Cette situation, ainsi que le baby-boom, coïncident avec l’arrivée importante d’immigrants provenant d’une Europe dévastée et appauvrie. Alors que les vieux logements sont impopulaires et que le rythme de construction des nouvelles habitations unifamiliales peine à suivre l’accroissement de la population, Montréal connaît une profonde crise du logement.

À Montréal même, on fait table rase des fermes et de quartier entiers. De nouveaux règlements de zonages municipaux imposent la construction d’habitations unifamiliales ou de maisons semi-détachées, avec une place pour l’auto, dans l’espoir vain de déplacer la problématique du stationnement sur rue vers le domaine privé. La Société canadienne d’hypothèque et de logement (SCHL), au terme d’un concours architectural, lance le document 67 homes for Canadians: attractive house plans designed especially for Canadian requirements.

La conjugaison de ces facteurs explique la période d’expansion du territoire suburbain, aux dépens de la ville historique. À ce jour, cette problématique perdure.

Un nouvel urbanisme

À l’époque, le territoire actuel de l’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville sert de banc d’essai à ces nouvelles politiques d’aménagements urbains. Ce constat est bien visible à deux endroits: la paroisse Saint-André-Apôtre, au début des années 1950, puis, le Domaine-de-Saint-Sulpice, au début des années 1960.

Des organismes issus de la société civile vont jouer un rôle de premier plan dans le peuplement de ces deux quartiers. Le premier est la Ligue ouvrière catholique (LOC).

Claude Lalonde est impliqué dans la défense du patrimoine dans l’arrondissement. Il a collaboré à la murale du Domaine Saint-Sulpice au complexe Claude-Robillard. (Photo: F. Robert-Durand, JDV)

Céline Ménard, explique, dans des articles publiés dans les 11e et 12e éditions d’Au fil d’Ahuntsic, Bordeaux et Cartierville, bulletin de la Société d’histoire d’Ahuntsic-Cartierville (SHAC), que «ce mouvement reçoit de l’épiscopat catholique la mission de rendre plus chrétienne la famille ouvrière». Elle nous indique de plus que «de tous les services offerts par la L.O.C. à ses membres, c’est indéniablement dans celui du logement que son implication sociale a été la plus constante et celle où elle a connu ces plus grands succès».

Ce sont des membres de ce mouvement qui, les premiers, deviennent propriétaires dans ce qu’on appelle aujourd’hui Fleury Ouest. Et ce, grâce aux politiques fiscales et hypothécaires que la LOC a contribué à obtenir pour ses membres. Dans le Domaine-de-Saint-Sulpice, des coopératives mettront près d’une vingtaine d’années à obtenir les premiers terrains du Vieux-Domaine.

L’emplacement du futur site de l’écoquartier Louvain Est (Photo : Courtoisie de la Ville de Montréal)

Parmi elles, La Familiale, inspirée par la vision de Berthe Chaurès-Louard, se démarque nettement par un esprit d’entraide qui va bien au-delà du logement. Ses membres souhaitent habiter un quartier conforme à leurs aspirations coopératives, notamment dans le domaine de l’alimentation.

C’est dans ce quartier que le premier magasin Cooprix du Québec ouvrira ses portes en 1968. Les premiers habitants de ces quartiers inspirent aujourd’hui, d’une certaine manière, le projet de Fiducie d’utilité sociale pour le projet d’écoquartier Louvain Est.



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