Le Journal des voisins présente Jacques Lebleu dans la chronique Belle rencontre du Mag papier de février 2023. Photographe, artiste visuel et militant écologiste, il est surtout l’un des principaux personnages auquel on pense quand il s’agit de défendre le patrimoine bâti à Ahuntsic-Cartierville.
Jacques Lebleu est aussi membre de la Société d’histoire d’Ahuntsic-Cartierville. Il livre au Journal des voisins (JDV) ses réflexions sur les enjeux de la préservation des anciennes bâtisses menacées dans l’arrondissement et explique comment le souci de la valeur historique rencontre la protection de l’environnement.
Journal des voisins : Est-ce que les moyens légaux dont dispose l’administration municipale sont suffisants pour protéger les bâtiments historiques?
Jacques Lebleu : Les protections accordées aux biens culturels patrimoniaux sont très inefficaces. La construction de maisons de ville sur la rue des Jésuites, dans l’aire protégée de l’église de la Visitation, et le chantier d’une nouvelle résidence à deux pas de la maison du Pressoir, classée immeuble patrimonial du Québec, sont des exemples éloquents. Les citoyens doivent donc s’intéresser de près aux règlements de zonage et ceux-ci doivent être rédigés avec une vision globale d’un secteur donné. Ils ne doivent surtout pas se borner à ce qui est permis sur un lot donné.
JDV : Comment faire évoluer les règlements pour qu’ils soient plus efficaces selon vous?
JL : Il faut arriver à penser en fonction de la collectivité. Le droit individuel exerce une trop forte préséance sur le bien commun. Un glissement vers le libéralisme social et économique se poursuit depuis 1980. Il faudrait arriver à préserver un noyau villageois de la même manière qu’on préserve des espaces pour des écoles et des parcs.
JDV : On a vu de nouvelles bâtisses se construire sur les restes de maisons anciennes qu’on a tenté de préserver. Comment faire pour éviter cela?
JL : Les nouvelles constructions ne doivent pas échapper aux règlements en faveur de la réservation du patrimoine. C’est une invitation ouverte à la démolition de ce qu’il nous reste.
JDV : Les règlements, notamment de zonage, semblent assez contraignants et assurent la protection du tissu urbain, que ce soit pour les alignements ou les hauteurs par exemple. Comment pourraient-ils évoluer?
JL : Les règlements de zonage doivent prendre en considération les milieux écologiques et la lutte aux changements climatiques. Dans le cas du cœur villageois du Sault-au-Récollet, qui est aussi la porte d’entrée du parc-nature de l’Île-de-la-Visitation, il serait de mise de limiter la présence des automobiles et de favoriser l’accès par transport collectif. Personnellement, je crois qu’il serait sensé d’imposer un maximum de places de stationnements par unité d’habitation et de proscrire l’ajout de nouvelles portes de garage en façade entre l’église de la Visitation et la rue de Lille.
JDV : Qu’est-ce qui selon vous devrait guider les nouveaux règlements?
JL : La taille des maisons est en augmentation constante dans toute l’Amérique du Nord depuis les années 1960. Pendant la même période, la taille des ménages a diminué de moitié. Il serait temps de mettre des limites par secteur à la taille des résidences et de plutôt favoriser l’ajout de logements sur les mêmes lots afin de faciliter l’accès à la propriété et au logement. Ceci est applicable à des secteurs complets de tout l’arrondissement.
Je me demande d’ailleurs si l’arrondissement est le bon niveau administratif pour assurer la préservation du patrimoine. La multiplication des paliers de bureaucratie limite la capacité des citoyens à se faire entendre des fonctionnaires. Les instances qui prennent les décisions ultimes sont souvent inaccessibles.
JDV : Pourquoi les citoyens doivent-ils être encouragés à défendre le patrimoine?
JL : Il ne faut jamais s’en remettre aux politiciens.
Ce texte a été publié dans la version imprimée du Journal des voisins, le Mag papier de février 2023, à la page 26.
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