Un mois après la spectaculaire défaite du gouvernement du Parti libéral du Québec (PLQ) par la Coalition avenir Québec (CAQ), Christine St-Pierre, facilement réélue dans la circonscription d’Acadie, demeure humble. En entrevue avec journaldesvoisins.com, la députée libérale qui a été élue pour un cinquième mandat a reconnu que la sortie «musclée» avec sa collègue candidate dans St-Laurent, Marwah Rizqy, contre le chef caquiste François Legault en début de campagne, avait été une «erreur». Pesant ses mots, elle avait déploré « le féminisme de façade » de celui qui allait devenir premier ministre du Québec. Mais la présentation de la nouvelle équipe ministérielle a confirmé ses dires; malgré la présentation d’un cabinet paritaire, les postes-clés de l’équipe Legault sont allés aux hommes.
Mea-Culpa
L’intervention avait été pour le moins tonitruante quand en début de campagne, les ténors des communications au Parti libéral du Québec envoyaient deux candidates au front (Christine St-Pierre et Marwah Rizqy, cette dernière candidate novice dans la circonscription situé à l’ouest d’Acadie) pour répliquer à la CAQ qui avait fait couler aux médias des conversations privées relativement aux indécisions de la gestionnaire en santé Gertrude Bourdon, qui en bout de piste, a fait faux bond au chef caquiste en se présentant sous l’étiquette libérale à Québec.
Mme Rizqy et la ministre sortante Christine St-Pierre avaient aussi cité d’autres exemples pour dénoncer François Legault, entre autres son rejet du projet de ligne rose de la mairesse de Montréal. Pour Mme St-Pierre, ces interventions (des femmes visées) étaient synonymes de « féminisme de façade ». Mme Rizqy, avait poussé le bouchon plus loin en comparant M. Legault au controversé président américain Donald Trump.
« On voulait faire ressortir que, quand c’est privé, ça doit rester privé, a déclaré Mme St-Pierre. Mais est-ce que l’on referait ça de la même façon, non; est-ce que ce fut maladroit, oui. Ça fait partie du post-mortem. Certaines personnes ont fait une lecture erronée. C’était une erreur. Oui, je l’ai fait savoir et j’en prends la responsabilité ultime, car cela me revenait. Est-ce qu’on est capable d’effacer l’ardoise? Non. C’est fait. J’ai joué l’équipe, c’était maladroit, mal préparé. Oui je fais mon mea culpa mais tous les partis ont commis des maladresses dans la campagne » a-t-elle insisté.
Mais l’actualité des dernières semaines lui a donné raison.
« Je suis une grande féministe et suit M. Legault depuis longtemps. Il ne s’est jamais viré à l’envers pour la cause des femmes. Oui, il est allé chercher beaucoup de femmes comme candidates, mais il n’est pas un grand féministe même s’il a un cabinet paritaire. Jean Charest, lui, croyait à l’apport des femmes. Regardez où sont allés les postes majeurs dans le cabinet; à des messieurs ».
Active malgré l’échec
Malgré la défaite libérale, la députée du nord-ouest de Montréal n’a pas mis de temps à s’imposer au sein du nouveau caucus libéral.
Ainsi, après l’annonce de Philippe Couillard, qui aura dirigé le Québec pendant quatre ans, Christine St-Pierre a levé la main pour «solliciter» la chefferie libérale sur une base temporaire, en attendant la nomination d’un nouveau chef.
« J’ai effectivement manifesté de l’intérêt pour le poste, mais le caucus en a décidé autrement. Je me suis ralliée au député de Mont-Royal-Outremont, Pierre Arcand (ndlr: un homme d’affaires ayant fait fortune en vendant les stations de radio CKVL et CKOI au groupe Corus). M. Arcand est un homme sage, rassurant, et je suis bien à l’aise avec la décision qui a été prise », a-t-elle dit.
Christine St-Pierre a aussi plaidé en vain pour que la présidence de l’Assemblée nationale revienne à une femme.
« La seule femme qui a assumé ce poste a été Louise Harel (ndlr: ex-députée de Maisonneuve pour le Parti québécois) et pour un mandat d’un an seulement. Je comprends que la décision incombe au nouveau gouvernement. Mais il aurait été important d’envoyer un signal que les femmes ont leur place et que la fonction n’aille pas à quelqu’un comme prix de consolation », tel que suggéré par certains avec la probabilité que l’ex-animateur François Paradis rafle le poste, après avoir été critique en santé dans l’opposition.
Toutefois, toujours au sujet de la place des femmes en politique, Christine St-Pierre a de quoi se réjouir malgré la défaite «crève-cœur» pour reprendre ses mots.
« C’est la première fois qu’il y a plus de femmes que d’hommes au sein de notre députation et un record d’élues au sein même du Parlement (ndlr: 53 sur 125, le pourcentage le plus élevé de femmes élues au Canada). C’est intéressant et il faut s’en réjouir », a-t-elle relevé.
Post-mortem
Malgré tout, au sein du PLQ, Mme St-Pierre reconnaît que plusieurs analyses seront nécessaires pour comprendre le résultat du 1er octobre alors que la formation fédéraliste n’a même pas franchi le cap des 25% aux suffrages universels et n’obtenant que 17% du vote francophone.
« Je l’ai emporté avec une majorité de 9000 voix (20 000 à l’élection précédente). Mais il faut s’interroger sur le fait que 20% des libéraux ne sont pas sortis pour aller voter. (…) Je suis honorée d’avoir obtenu un cinquième mandat cela prouve que nous sommes en symbiose avec la population, mais je ne considère pas avoir mérité une victoire «spectaculaire». Oui un grand exercice est à faire, le post-mortem, afin que l’on sache les raisons pour lesquelles des libéraux ne sont pas allés voter. Il faut aussi les reconquérir, ceux-là même qui ont des valeurs libérales profondes. On va reconstruire la maison, mais il faut aller à la rencontre de nos militants, les écouter. Faut regarder dans l’avenir et arriver avec des projets, une vision du Québec moderne pour les 25 prochaines années, vision qu’aura à défendre le prochain chef. La campagne de 2022 est commencée », a-t-elle plaidé.
Défis dans Acadie
Pour Christine St-Pierre, la question de l’immigration est en tête de liste des priorités dans sa circonscription pour les quatre prochaines années.
Et elle compte bien mener l’offensive quand le gouvernement Legault présentera au printemps son projet de loi qui devrait prévoir l’interdiction du port de signes religieux pour les employés de l’État en autorité.
« Il faut défendre les intérêts des immigrants dont les femmes, face au gouvernement. Des gens seront mis à la porte s’ils ne soumettent pas au diktat du gouvernement. Il faut que les immigrants se sentent accueillis et encadrés. Déjà, ils sont confrontés à beaucoup de chômage. Il faudrait par exemple faire de petits salons de l’emploi dans la circonscription plutôt qu’un grand », a-t-elle suggéré.
Au sujet du pôle Chabanel-Marché central, la députée estime qu’il y a encore du travail à faire :
« Ça mérite une attention plus intense. Je travaille avec Mme Mélanie Joly pour que le secteur soit un ‘’hub’’ de la mode, des tissus intelligents. Les prix de location sont avantageux (ce qui est bon pour les entreprises en démarrage). Il y a beaucoup de potentiel pour vendre le ‘’wow’’. Mais il manque peut-être un hôtel dans le secteur pour faire des salons et événements. Il faut par contre un promoteur et l’acceptabilité sociale », a-t-elle averti.
En santé, elle se félicite du travail fait avec la députée voisine de Maurice-Richard, Marie Montpetit, concernant la réouverture de la clinique médicale au 241 Fleury ouest avec l’arrivée prochaine de neuf médecins.
« Ce sera 12 000 prises en charge par des jeunes médecins qui ont des visions et des projets. C’est le ‘’fun’’ de compter sur ces gens-là qui veulent travailler ici, c’est fantastique » a-t-elle mentionné.
La députée libérale, autrefois ministre des Relations internationales et maintenant porte-parole de l’Opposition officielle en matière de Sécurité publique, travaillera aussi, plus à l’ouest, du côté de St-Laurent, afin que la Maison de la famille (qui offre du soutien aux enfants avant leur entrée à la maternelle) obtienne un financement pérenne.
«Les immigrants y vont pour obtenir des conseils, avoir du répit. Et aussi il ne faut pas oublier le grand défi de lutte à la pauvreté », a-t-elle conclu.
La députée d’Acadie, Christine St-Pierre, en entrevue le rédacteur en chef adjoint du journaldesvoisins.com, Alain Martineau (Photo: archives jdv)
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