Faire ses impôts en solo n’est pas avantageux pour tout le monde. Et tout retard vous expose à de sérieux ennuis.

« La chose la plus difficile à comprendre c’est l’impôt sur le revenu », disait Albert Einstein ! Et pourtant, 2,5 millions de Québécois (37% des citoyens) ont eux-mêmes rempli leur rapport d’impôt pour l’année d’imposition 2020, selon Revenu Québec. Par contre, 63% des gens ont eu recours aux services d’un préparateur d’impôt.

De moins en moins de contribuables utilisent le formulaire papier, car 93,6% des Québécois (90,9% au fédéral) ont utilisé un logiciel pour préparer leurs impôts, soit 6,3 millions de personnes. Et le tiers des contribuables qui utilisent un logiciel ont tout de même fait appel à un préparateur d’impôts.

D’autre part, la transmission électronique des déclarations est très populaire : autour de 32,6% des contribuables et 58,1% des préparateurs (comptable, service spécialisé) procèdent de cette manière. Cela dit, une part indéterminée des contribuables font leur déclaration avec un logiciel, avec ou sans l’aide d’un préparateur, et impriment les résultats, pour transmettre leur déclaration par la poste…

Les limites de la techno

Même si la très grande majorité des gens utilisent un logiciel pour préparer leurs impôts, des mises en garde s’imposent.

Année après année, les experts disent que ces logiciels sont avantageux si votre situation fiscale est simple. Par exemple, si vous êtes salarié ou rentier avec une seule source de revenus, que vous n’avez qu’un compte REER ou un compte CELI et très peu de dépenses déductibles. Par contre, dès que votre situation est quelque peu complexe, les logiciels font inévitablement des erreurs.

Le magazine Protégez-Vous a publié que de telles erreurs peuvent faire perdre plus de 1000$ au contribuable. Certains experts ont répertorié jusqu’à 70 erreurs commises fréquemment par de tels logiciels, les plus courantes se rapportant aux crédits d’impôt, qu’ils « oublient » de réclamer.

Par ailleurs, on ne compte plus le nombre de cas, rapportés par les médias au fil des ans, où le fisc se met aux trousses du contribuable à cause d’erreurs commises par les logiciels d’impôt.

Si le logiciel d’impôt, c’est votre truc, les sites de l’Agence du revenu du Canada (ARC) et de Revenu Québec offrent une liste de logiciels d’impôt autorisés. Le magazine Protégez-Vous publie aussi un comparateur de ceux offerts sur le marché. ImpôtExpert et TurboImpôt se retrouvent en tête de ce classement.

Certains logiciels sont téléchargeables (un seul, TaxTron, l’est pour le Mac). La plupart offrent un accès en ligne à partir du navigateur de votre ordinateur, tablette ou téléphone.

Certains d’entre eux permettent de « préremplir » votre déclaration, ce qui vous fera économiser beaucoup de temps. Il faut toutefois préalablement s’inscrire aux services « Mon dossier » de l’ARC et de Revenu Québec. D’autres permettent d’intégrer automatiquement les données des feuillets fiscaux… mais en oublient parfois quelques-uns au passage. Certains importent des montants en double. Il faut donc vérifier feuillets et reçus d’impôt et comparer leurs chiffres avec ceux récoltés par le logiciel.

Si vous vous sentez mal à l’aise ou craignez d’oublier certains aspects de votre situation fiscale, les logiciels comportent des outils de recherche par mot clé. Vous pouvez aussi faire appel au soutien technique, mais ces gens ne sont surtout pas fiscalistes et peuvent commettre des erreurs.

Mises en garde

On a vu des logiciels corriger des bogues en pleine saison d’impôt. Il est donc sage d’attendre la fin mars avant d’envoyer sa déclaration préparée avec un tel logiciel. On ne sait jamais…

Il est aussi fortement conseillé de consulter les sites internet de l’ARC et de Revenu Québec, qui offrent d’intéressants outils pour préparer ses déclarations, dont des listes à jour de crédits d’impôt et de déductions fiscales.

Un bon truc pour procéder avec efficacité : rassemblez tous vos documents fiscaux et classez-les par catégories (reçus de dépenses admissibles, de dons, liés au salaire, à différents revenus, etc.). Gardez également près de vous votre déclaration de l’année précédente; elle pourra servir de guide pour remplir celle de 2021.

Avoir de l’aide

C’est bien beau les logiciels, mais connaissant le niveau déplorable de la littératie financière des citoyens, de nombreux contribuables devraient tout de même faire appel à un préparateur. D’autant plus que plus de 40% des Canadiens ne seraient pas à l’aise avec des notions comme le traitement fiscal des gains de capital ou des revenus de dividendes.

Et ça se complique drôlement pour les contribuables dont la situation fiscale est moindrement complexe : RAP, familles reconstituées ou éclatées, revenus d’immeubles locatifs, d’Uber, d’AirBnB, travailleurs autonomes avec ou sans incorporation, roulement de REER au conjoint, fractionnement des revenus entre retraités, personnes ayant fait faillite dans la dernière année, gains ou pertes de capital avec une part de l’impôt à la source perçue à l’étranger, investissements en cryptomonnaies ou en NFT, revenus de dividendes ou d’intérêts d’obligations, revenus de ventes sur kijiji ou eBay, report de pertes de placement, avances d’entreprises, déductions pour dépenses de télétravail pour salariés, contributions avec droits inutilisés, REER ou CELI, etc.

Les travailleurs autonomes devraient impérativement faire faire leurs impôts par un spécialiste, tellement leur situation peut se compliquer avec une liste presque infinie de dépenses admissibles. D’autant plus que comptables et fiscalistes représentent une dépense déductible!

Certains contribuables à revenus modestes devraient aussi faire appel à un spécialiste. Car un très grand nombre « oublient » certaines déductions ou crédits auxquels ils ont droit et qui représentent parfois des centaines de dollars de plus dans leurs poches… C’est notamment le cas de nombreux chefs de famille monoparentale ou d’aînés.

Il est préférable de faire appel à un comptable qui s’y connaît en fiscalité, un planificateur financier ou un fiscaliste, plutôt qu’un préparateur d’impôt. Des enquêtes journalistiques ont démontré par le passé que ces derniers faisaient aussi des erreurs.

Ceux qui n’ont pas les moyens de se payer un spécialiste peuvent faire appel à une clinique d’impôt étudiante, offerte dans les collèges et universités. Certains organismes communautaires offrent aussi des « cliniques d’impôt ». Ces services sont gratuits ou presque.

Ne pas être en retard

Chaque année, de nombreux contribuables ne produisent aucune déclaration de revenus. Nombre d’entre eux croient, à tort, que ça ne vaut pas la peine. Or, ils pourraient bénéficier d’avantages fiscaux dont ils ne soupçonnaient pas l’existence. Où ils doivent peut-être de l’argent au fisc sans le savoir… Ce dernier finit toujours par rattraper les contribuables qui sont dans cette situation.

Produire une déclaration en retard est souvent une catastrophe pour de nombreux citoyens. Notamment pour ceux qui reçoivent de l’argent du gouvernement, surtout s’ils touchent des crédits de TPS/TVH, l’Allocation canadienne pour enfants, la prestation pour enfant handicapé, la prestation de la Sécurité de la vieillesse, le Supplément de revenu garanti, etc. Car le gouvernement se base sur la déclaration d’impôt pour calculer le montant de ces avantages fiscaux. S’il n’a pas reçu votre déclaration, il ne versera rien. On parle ici parfois de plusieurs centaines de dollars encaissés par des gens aux revenus modestes.

Dates limites, et pas de délai

Cette année, la date limite pour transmettre votre déclaration est le 30 avril 2022, tant à Ottawa qu’à Québec. Le gouvernement considère qu’une déclaration a été envoyée à temps s’il l’a reçue au plus tard le 2 mai 2022 à minuit. Le cachet de la poste au 30 avril constitue aussi une preuve. Même chose pour le paiement d’un solde dû.

Les travailleurs autonomes ou les contribuables exploitant une entreprise, ainsi que les époux ou conjoints de fait en couple avec un contribuable ayant ce statut, bénéficient d’un délai : ils peuvent produire leur déclaration jusqu’au 15 juin 2022. Tout solde dû doit être toutefois acquitté avant le 2 mai 2022 à minuit.

Si vous croyez que vous ne pourrez pas produire votre déclaration à temps, sachez qu’il est impossible de se négocier un délai.

Pénalités et intérêts

Si vous produisez votre déclaration en retard, vous vous exposez à une pénalité de 5% de tout solde impayé au 30 avril. À cette pénalité s’ajoute une pénalité additionnelle de 1% par mois de retard.

Les pénalités sont plus imposantes si c’est le fisc qui vous demande formellement de produire des déclarations tardives pour les années 2018, 2019 et 2020. Au fédéral, ça représente 10% de tout solde à payer.

À ces pénalités s’ajoutent un intérêt annuel entre 5% et 10% sur tout solde d’impôt impayé au 30 avril, qui varie selon la situation du contribuable. Cet intérêt est calculé quotidiennement et imposé tant que le solde n’est pas payé au complet.

Si vous êtes en retard et que vous croyez que vous devez de l’argent au gouvernement, ne faites pas l’autruche : contactez l’ARC et Revenu Québec dans les meilleurs délais. Il est préférable de négocier un arrangement avec le fisc que de se faire saisir son compte bancaire sans avertissement…

À signaler : les autorités fiscales se montrent particulièrement accommodantes si votre dette fiscale est liée à la Covid-19.

Gardez vos papiers

Un conseil : conservez tous vos feuillets, reçus, avis de cotisation, retours d’impôt et déclarations d’impôt dans un endroit sûr. N’hésitez pas à numériser tous ces documents et conservez-les sur votre service personnel d’infonuagique (iCloud, Google Cloud, etc.).

Les fiscalistes suggèrent de conserver ces documents au moins pendant sept ans. Mais si vous avez des placements, il est préférable de les garder une décennie (où jusqu’à votre décès s’ils sont numérisés). Le fisc se donne jusqu’à trois ans pour corriger ses erreurs et vous cotiser à nouveau. Mais il peut remonter jusqu’à sept ans s’il juge que vous avez fait une erreur dans votre déclaration.

Si vous vous rendez compte d’une erreur après avoir envoyé votre déclaration, vous pouvez effectuer une correction. Pour ce faire, il est préférable de communiquer avec l’ARC et Revenu Québec.

 



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Nicolas Fayad
Nicolas Fayad
2 Années

Cet article est clair et simple. Il résume très bien la situation. Je suis un préparateur d’impôts volontaire. Je ne suis ni comptable, ni fiscaliste. Simplement j’introduis les données dans le logiciel et examine les résultats. J’ai une connaissance de base suffisante pour aider dans les cas « simples ». Pour les autres, suivez les recommandations du journaliste Stéphane Desjardins.

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