Chloé Bois, Mirko Torres et Ngoc Duc Trinh montrent des exemples d’impression élaborés à l’ICI. Phto :Amine Esseghir / JDV

L’imprimerie, un métier qui a dû évoluer rapidement, est poussée depuis toujours par les innovations et les nouvelles technologies. On la croyait agonisante, affligée par la fin du papier annoncée depuis deux décennies au moins, mais il n’en est rien.

 « Pour beaucoup de personnes, l’imprimerie, c’était la fabrication de journaux », dit Chloé Bois, directrice générale et chercheuse principale à l’Institut des communications graphiques et de l’imprimabilité (ICI). Cet organisme, qui jouxte le collège Ahuntsic, est une sorte de laboratoire d’essai de toutes les idées et innovations liées à l’impression.

Mme Bois cite les magazines et les livres, des médiums contraints à l’évolution par des technologies qui ne leur sont pas toujours favorables. Dans le même temps, l’imprimerie où l’imprimabilité développe des innovations auxquelles on ne pense pas a priori.

On imprime des panneaux de signalisation, des enseignes, des tissus, des supports qui ne cessent d’évoluer. « Toutes les décorations, tous les papiers peints… Vous n’imaginez pas à quel point les meubles en faux bois sont imprimés, fait observer la chercheuse. On imprime les veines de bois, puis on pense que c’est du teck ou du chêne. »

L’impression imprègne la vie de tous les jours. En plus des supports, les encres – ou ce qui en ferait office – évoluent aussi. « On est capable d’imprimer des circuits électriques, des antennes et des piles. Nous avons plusieurs projets de capteurs médicaux et de senseurs électrochimiques complètement imprimés », révèle Mirko Torres, directeur de projet en recherche et développement et environnement au sein de l’ICI.

« On peut aussi utiliser des encres pour y mettre des particules antimicrobiennes afin d’assurer, par exemple, que lorsqu’on touche un menu de restaurant, on ne propage pas de virus ou de bactéries. Il y a un tas de choses qu’on ne voit pas et qui se trouvent dans le décor ou dans un objet fonctionnel », mentionne Ngoc Duc Trinh, directeur général adjoint et chercheur principal à l’ICI.

 Ancien métier, nouvelle vision

Les mêmes principes d’impression produisent des usages inattendus.

Pour que l’imprimerie continue de vivre, il faut que les imprimeurs et leurs clients y croient encore. Ce sont des gens qui viennent d’autres secteurs qui découvrent l’imprimabilité comme l’un des nouveaux procédés de fabrication avancée. « Ce sont eux qui sont intéressés et convaincus. Ce sont les gens des matériaux fonctionnels, de l’électronique, des biomatériaux médicaux… », énumère Mme Bois.

Ceux qui vont fabriquer ou imprimer embarquent assez facilement, d’autant qu’à l’ICI, on teste et on éprouve des procédés, et on facilite les applications. « La majorité des imprimeurs – c’est quelque chose que j’ai appris en travaillant ici – sont des artisans. Donc, ce n’est pas très difficile de les convaincre de faire quelque chose de nouveau, de développer un produit encore plus incroyable. Ce sont des gens passionnés », renchérit M. Torres.

L’ICI est également un établissement où l’on vient s’instruire. On y apprend des techniques et, surtout, à découvrir des innovations. Formation continue ou sur mesure en entreprise, séminaires publics pour consultants, graphistes et travailleurs autonomes, l’ICI répand la connaissance. « Dans tous nos projets de recherche, nous intégrons des étudiants collégiaux et universitaires », souligne Mme Bois. Un étudiant du collège Ahuntsic, auquel est affilié l’ICI, peut aussi participer aux projets de recherche. « Beaucoup d’étudiants en technique ont besoin d’un stage de fin d’études et viennent vers nous », ajoute M. Torres.

Une formation pratique approfondie ouvre beaucoup de perspectives. « Ce n’est pas pour nous lancer des roses, mais nos étudiants sortent d’ici extrêmement bien équipés, surtout pour des jeunes en sciences de la nature, en chimie analytique ou en biotechnologie », précise M. Torres. Une multitude de gens s’imprègnent ainsi de ce qu’il est possible de réaliser en imprimerie et rejoignent l’industrie avec de vastes connaissances et des idées qui la font vivre.

 Et l’IA dans tout cela ?
  • « Certains éléments d’équipement et consommables peuvent se changer automatiquement sur la presse », explique Ngoc Duc Trinh. Il y a des machines autonomes, même si l’humain continue de gérer la fabrication.
  • « On veut aider les entreprises à automatiser leurs procédés en intégrant plus d’intelligence artificielle, » dit Ngoc Duc Trinh.
  • « Nous étudions les applications de l’IA. Dans notre secteur, cela a pas mal d’influence sur la création du contenu, du message », souligne Mme Une influence observée sur la partie graphique, sur les textes, mais aussi sur le traitement des données qui viennent des machines.
  • « Avant l’IA, il y a eu l’automatisation des procédés et la mise en réseau des parcs d’équipement. On faisait beaucoup de maintenance préventive », souligne Mme Les machines, avec leurs multiples capteurs, sont de grandes génératrices de données qu’il faut pouvoir traiter rapidement, et l’IA est très utile dans ce cas.
  • « Quand on travaille sur des formulations un tant soit peu complexes, on peut s’aider de logiciels existants », avance M. Torres. Les simulations de formulations sur ordinateur ont beaucoup évolué grâce à l’IA.
  • Tout compte fait, MmeBois est convaincue que l’IA demeurera une assistante : « Je ne pense pas qu’elle puisse remplacer les chercheurs. »
Imprimer plus vert
  • « Beaucoup d’imprimeurs font attention à leur empreinte écologique. Ils cherchent comment ils peuvent améliorer leurs procédés, prévient Mirko Torres. Ils sont soucieux des encres qu’ils utilisent et des gaz à effet de serre qu’ils émettent. »
  • « Il n’existe pas de produit qui n’a aucun impact environnemental, ajoute-t-il. Cela étant dit, les encres, dans chaque imprimé, comptent pour peu. Le substrat, ou support – le papier, le plastique, peu importe – représente 80 à 90 % du poids ; c’est la partie la plus importante. Il faut regarder où ce substrat finira. Sommes-nous capables de mieux le recycler ? »
  • Une initiative observée en imprimerie : l’éco-encrage. « Utilise-t-on convenablement l’encre ? A-t-on besoin de mettre de l’encre partout ? » questionne M. Torres.

Cet article a été publié dans la version papier du JDV de juin 2025.



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