Les journalistes du JDV ont recueilli les témoignages d’immigrants arrivés à des époques distinctes et venant de régions du monde différentes.

 

Magalie Luly, originaire d’Haïti. Photo : courtoisie Magalie Luly

Magalie Luly (Haïti)

Née en Haïti, Magalie Luly y a vécu jusqu’à l’âge de huit ans. Son frère, ses trois sœurs et elle vivaient alors avec leur grand-mère, leurs parents étant aux États-Unis dans le but d’y immigrer. Son père n’a toutefois pas réussi à avoir son visa, de sorte qu’il est venu au Québec.

« C’est ainsi qu’a commencé mon histoire d’immigration au Québec », raconte Magalie Luly. La grand-mère, qui s’occupait des cinq enfants en Haïti, les a préparés au retour de leur mère qui venait les chercher pour rejoindre le papa au Québec.

L’arrivée à Montréal

« En atterrissant la nuit à Montréal, j’ai eu le sentiment que tout était gris, les maisons toutes pareilles. Pour moi, ce n’était pas joyeux. » Le printemps, avec le froid et uniquement des vêtements d’été, fut un grand choc pour la famille. « La neige ressemblait à du gros sel pour moi. Puis, un jour, je la vois fondre… toute une expérience ! »

En Haïti, Magalie était victime de violence à l’école de la part de certains professeurs. Elle voulait donc partir. Elle ne savait pas trop à quoi s’attendre en arrivant au Québec, et ça lui a pris du temps pour ne plus avoir peur de se faire frapper à l’école. « J’ai mis du temps à m’adapter et à reconnaître que personne ne me frapperait plus. »

Hue Tam Pham Thi, originaire du Vietnam. Photo : courtoisie Hue Tam Pham Thi

Hue Tam Pham Thi (Vietnam)

Hue Tam Pham Thi est arrivée au Québec en 1991 après avoir tout d’abord immigré en France avec ses parents en tant que réfugiés politiques et boat people. Aujourd’hui, elle prend le temps de vivre après avoir eu une vie remplie et toujours tournée vers le bien-être des autres.

À son arrivée à Paris à l’âge de neuf ans, elle ne parlait pas français. Ce fut le 1er choc. « Mon père est parti en premier et a fait venir la famille par la suite. Il n’y avait pas de société d’accueil en France, comme j’ai pu l’apprécier ici. Toute la famille voulait rentrer au Vietnam. »

Un premier voyage déterminant

Hue Tam explique qu’avec son mari, pendant des vacances, elle a visité le Québec jusqu’à l’île Bonaventure, et que, sur le chemin du retour, elle lui a dit qu’elle se retrouvait ici. « J’ai eu un coup de foudre, comme si mon âme s’était reconnue. »

À leur retour en France, elle a fait toutes les démarches de demande de résidence. Ils sont venus au Québec avec leurs trois enfants. « Comme Français, mon mari a eu beaucoup de mal à s’adapter ; moi, c’était le contraire. J’affectionnais particulièrement le statut de la femme ici. Au bout de trois ans, on a divorcé, car il voulait que je retourne en France et il n’en était pas question pour moi ; je me sentais chez moi ici », affirme-t-elle.

Elle a tout de suite aimé Montréal, l’accueil, la diversité, le multiculturalisme, la nature partout présente. « La France, c’était l’exil ; le Québec, c’est mon choix. »

Professeure de français diplômée de La Sorbonne, Hue Tam a dû retourner aux études pour être en mesure d’enseigner au Québec. Elle a par la suite étudié en psychologie pour, comme elle le dit, mettre ses compétences interculturelles, ses expériences et même ses traumas au service des autres.

« Peu importe d’où l’on vient, on est un être humain. Nos forces, nos faiblesses et notre vulnérabilité sont les mêmes. »

José Edouardo Dorante Pardo, président fondateur de MTL Héros du terrain, est élu au conseil d’administration de la Table de concertation jeunesse Ahuntsic le 18 juin 2025. Photo : courtoisie José Edouardo

Les multiples facettes d’Eduardo (Venezuela)

D’entrée de jeu, José Eduardo Durante Pardo nous dit : « Toute ma vie est à Ahuntsic. » Étudiant du collège Ahuntsic dans le programme Arts, lettres et communication, option Langue, vénézuélien d’origine, il a immigré au Québec quand il avait 11 ans. En plus du chemin classique, à savoir la classe d’accueil, il accélère son intégration grâce au sport, notamment le soccer. « Le sport m’a permis de me faire beaucoup de connaissances au sein de mon école, d’avoir beaucoup d’amis. C’est quelque chose qui a facilité ma cohésion avec le Québec », se remémore-t-il.

Mordu de sport, Eduardo, comme l’appelle tout le monde, pratique, en plus du soccer, le basketball, la natation, les arts martiaux et l’athlétisme, notamment la course. C’est donc naturellement par le canal du sport qu’il décide de s’impliquer auprès de la jeunesse. Témoin des ravages causés par la drogue, il fonde avec un groupe d’amis MTL HÉROS DU TERRAIN pour inciter la jeunesse à adopter des pratiques saines. Par les réseaux sociaux, l’organisme rejoint de 40 à 80 personnes à chacune de ses invitations à un match amical. « L’année passée, le tournoi qu’on a organisé a rassemblé 300 jeunes ! », souligne-t-il.

Eduardo, 23 ans, est aussi au Parlement jeunesse du Québec en qualité de « présentateur de motion ». Il travaille comme technicien juridique, détenant une attestation d’études collégiale. Polyglotte avec cinq langues parlées à ce jour, il est aussi membre du Conseil jeunesse de Montréal et il postule actuellement pour une place de fantassin dans les Forces armées canadiennes.

Pauline Cinkenke. Photo : Courtoisie CRECA

Pauline Cinkenke (Congo) remercie le CRECA

On dit qu’il n’y a pas d’âge pour apprendre. Ou encore qu’il n’est jamais trop tard quand on a la volonté d’apprendre. Ces dictons résument le parcours de Pauline Cinkenke, 81 ans, Congolaise de la République démocratique. Orpheline, elle a vécu chez sa grand-mère. Là-bas, elle n’a pas eu la chance d’aller à l’école.

Lorsque Pauline a immigré au Québec à titre de réfugiée en 2002, elle ne connaissait « rien ». Et quand elle recevait des documents du gouvernement, elle sollicitait l’aide des passants : « Je marchais et je demandais pardon, pardon », narre-t-elle durant une cérémonie de remise de certificat en marge de l’assemblée générale annuelle du CRECA – centre d’éducation populaire autonome –, le 19 juin 2025. « Maintenant, je connais un peu le français ; j’arrive même à l’écrire », poursuit-elle toute émue.

Depuis le 15 mars 2023, elle fréquente le CRECA pour ses cours d’alphabétisation populaire. « Pauline est une perfectionniste. Elle fait toujours de son mieux. Elle démontre beaucoup d’intérêt et s’épanouit de jour en jour », commente Line Saint-Germain, animatrice en alphabétisation.

« C’est une évidence : madame Cinkenke aime apprendre, et ce n’est pas fini. Elle a confirmé qu’elle reviendrait l’année prochaine ! », nous indique dans une correspondance électronique Ilham Rezki, directrice générale du CRECA.

Élie Abou-Jaoude. Photo : Amine Esseghir / JDV

Élie Abou-Jaoude (Liban)

Élie Abou-Jaoude est né à Ahuntsic-Cartierville en 1992, deux ans après l’arrivée de ses parents du Liban. Le quartier s’est imposé à sa famille alors que des proches y habitaient déjà. Le secteur accueille depuis plus d’un siècle sa communauté, la seule reconnue dans la toponymie d’Ahuntsic-Cartierville. Une rue du Liban y existe depuis 1974.

Abou-Jaoude s’identifie toujours comme immigrant. « Les Libanais, nous sommes très attachés à notre culture, à la famille, à la communauté. Nous aimons faire la fête, nous sommes des entrepreneurs, et nous vivons surtout dans le moment présent », décrit-il.

Cette image le définit. Après des études d’ingénieur, il s’est investi dans le milieu communautaire. Il est l’instigateur d’un projet qui lui tenait à cœur : la murale réalisée à la piscine Marcelin-Wilson en 2024. L’œuvre de Razan Tarifi et Khammone Keo, deux artistes du quartier, rend hommage aux origines diverses des gens de l’arrondissement. Élie rappelle qu’on lui a demandé d’y mettre de quoi représenter le Québec. Que signifie, pour lui, d’afficher des symboles québécois ? « Nous sommes aussi le Québec », nous confie-t-il.

Immigrant bien intégré, il a aussi pris conscience de ce qu’il appelle la guérison sociale. Pour lui, c’est le pas de plus à faire pour arrimer au territoire les gens venus d’ailleurs.

Ces portraits ont été publié dans la version papier du JDV d’août 2025.



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