Livre publié récemment par Serge Leblanc. Voir à la fin de ce texte, une Brève publiée en mars dernier à la suite de la publication de cet opus de M. Leblanc. (Photo: courtoisie)

L’Ahuntsicois Serge Leblanc qui a donné une entrevue à journaldesvoisins.com en août 2018 est décédé tout récemment. Journaldesvoisins.com publie ici de nouveau la chronique Belle rencontre signée Elizabeth Forget-Le François et parue dans le mag papier de la rentrée 2018.

Serge Leblanc a fait carrière en cultivant l’art de communiquer et de déjouer les perceptions. Les milliers de personnes l’ayant croisé ignorent probablement que son apparence soignée tout comme son porte-documents secrètement vide avait un objectif : influencer leur regard.

« Une personne handicapée toujours bien vêtue retient davantage l’attention », confie M. Leblanc. Pour lui, la paralysie cérébrale n’est pas un frein. Par l’entremise de ses innombrables conférences, il s’est donné le défi d’amener les gens à voir la personnalité au-delà de la différence.

« Je suis né dans l’est de Montréal. Je suis un gars raffiné! », lance Serge Leblanc d’entrée de jeu donnant le ton aux échanges à venir. Après avoir survolé la question de son enfance en quelques phrases, il se lance dans la narration fascinante de son parcours professionnel.

Changer en éduquant

La carrière militante de M. Leblanc a débuté au hasard d’une rencontre. À 21 ans, il accepte, sur un coup de tête, une offre pour un poste de directeur général du chapitre Saguenay–Lac-Saint-Jean-Chibougamau de l’Association de paralysie cérébrale du Québec.

Serge Leblanc, août 2018. (Photo: Elizabeth Forget-Le François)

« Quand tu es jeune, tu as du guts et tu as le goût de défoncer les portes. Je n’avais pas d’expérience en gestion ou en administration, mais j’ai appris! », raconte-t-il.

Son dévouement au sein de ce bureau durant 16 ans a fait de Serge la coqueluche de la région. Lui-même avoue humblement avoir connu son heure de gloire. Les deux albums débordant d’anciennes coupures de presse ne démentent pas ses propos : il a joué un rôle important sur l’échiquier des personnes handicapées au Québec.

Ses succès sont cités dans des centaines d’articles et il est évident que son charme a joué auprès des médias. Les textes comme celui du journal Le Quotidien parlant de leur « Serge Leblanc national » en sont la preuve.

En 1990, M. Leblanc tire sa révérence pour devenir responsable provincial de la promotion et du développement au siège social de l’Association, à Montréal.

« Rencontrer les gens et faire des présentations, ça, c’était mon bag », révèle celui qui expérimentera, quelques années plus tard, la vie de travailleur autonome en démarrant son entreprise dans le domaine des communications.

Prendre la parole est pour lui une manière de provoquer la réflexion. Serge Leblanc veut briser les préjugés empêchant de percevoir les capacités et les aptitudes derrière le handicap.

Il a d’ailleurs eu le bonheur de parcourir le Québec à l’occasion de divers projets pour le compte de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ). Ses énergies étaient alors consacrées à favoriser l’intégration et le maintien en emploi des personnes handicapées.

M. Leblanc se désole de constater, après tant d’efforts, que les changements de mentalités sont trop peu fréquents.

«Les babines ne suivent pas les bottines et c’est frustrant », admet-il.

L’un des exemples flagrants de la ténacité des perceptions erronées véhiculées réside, selon lui, dans le vocabulaire. Les termes positifs laissent place à des formules telles qu’« être cloué à son fauteuil » ou encore « être atteint d’un handicap».

« Le discours n’a pas évolué. Pourtant, je n’ai pas l’impression de souffrir de paralysie cérébrale », commente l’Ahuntsicois.

Sa meilleure arme pour se faire entendre a toujours été l’humour. Certains se souviendront peut-être de son numéro, en 1995, avec Yvon Deschamps. Serge se remémore pour sa part avoir lu avec surprise qu’il s’agissait du spectacle le plus audacieux du festival Juste pour rire.

Un nouveau tempo

Ayant récemment subi un ACV, M. Leblanc a fait le choix de ralentir la cadence en optant pour une retraite active. En plus de siéger aux conseils d’administration du Défi sportif AlterGo et de l’organisme Soutien à la Personne Handicapée en Route vers l’Emploi, il consacre du temps à peaufiner le récit de sa vie bien remplie.

Avec l’aide d’une ancienne collègue, Serge Leblanc souhaite rendre compte de la réalité des personnes handicapées et aborder le thème de la paralysie cérébrale à travers sa biographie.

« Au Québec, peu de livres traitent du sujet et encore moins l’abordent comme moi et y intègrent l’aspect de la sexualité », explique M. Leblanc. Celui qui se décrit comme un livre ouvert confesse en riant s’être fait quelque peu censurer par ses premiers lecteurs pour éviter un ouvrage trop olé olé.

Même s’il est heureux de pouvoir vivre à son rythme, l’émotion est palpable lorsque l’homme dans la soixantaine parle de son départ de la FTQ et des douces attentions de ses anciens collègues. Le retraité a, par contre, été l’occasion de profiter de moments de qualité avec sa bien-aimée, au quotidien.

« Lise est une infirmière retraitée et, maintenant, elle n’a qu’un seul patient… C’est moi », plaisante Serge Leblanc en concluant l’entretien.


Extrait des Brèves de mars 2019

« Par-delà la paralysie cérébrale », de Serge Leblanc

M Éditeur annonce la parution du livre « Par-delà la paralysie cérébrale », écrit par Serge Leblanc, résidant d’Ahuntsic-Cartierville dont journaldesvoisins.com a déjà fait une « Belle rencontre » en page 23 de l’édition de septembre 2018 de son mag papier.  Serge Leblanc est handicapé physiquement (paralysie cérébrale), mais pas sur les plans intellectuel et social. Son ami, l’humoriste Yvon Deschamps, qui signe la préface de son autobiographie, dit de lui qu’il est « un exemple de générosité, de dévouement et d’efficacité ». Il soutient qu’« il aurait pu profiter de son handicap pour se faire dorloter, se faire servir, etc. Au contraire, il a travaillé dur, joué avec enthousiasme, aimé avec passion ». En effet, Serge Leblanc est un homme passionné et… passionnant.

Responsable régional de l’Association de paralysie cérébrale au Saguenay-Lac-Saint-Jean puis direc­teur de cet organisme, cheville ouvrière de dix-huit téléthons, ancien membre du conseil d’administration de l’Office des personnes handicapées du Québec, employé du Fonds de solidarité de la FTQ, conférencier apprécié (il a même essayé d’en faire son métier), Serge Leblanc a sillonné le Québec pour conscientiser les gens sur la condition des personnes handicapées.

Il n’est pas que le militant d’une cause. Cet homme généreux – trop sans doute – sait cultiver les amitiés et aimer. Ce boute-en-train refuse la pitié, défend bec et ongles son autonomie, même s’il a dû apprendre avec la progression de la paralysie cérébrale à accepter l’aide qu’on lui offrait et même à la solliciter.

Son souhait : « Avec la publication de ce livre, je ne prétends pas avoir réglé le sort des personnes handicapées au Québec. J’espère avoir provoqué une réflexion d’une profondeur telle qu’elle influencera ceux et celles qui vivent avec une déficience quelconque à s’insérer davantage dans la communauté. » Ce livre est plus que cela, car il influencera également les personnes sans handicap dans leur perception de l’autre, cette personne que l’on remarque parce qu’elle est différente. Cette autobiographie est avant tout une belle leçon de vie. Le livre contient un album souvenir. Préface de Yvon Deschamps et postface de Marc Portelance. (Sources : M Éditeur et journaldesvoisins.com)



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