Caricature: Martin Patenaude-Monette.

Depuis plusieurs années, Les Pollués de Montréal-Trudeau mènent de plein front une bataille sur le terrain politique pour mieux encadrer le vol des avions. En effet, le nombre croissant d’aéronefs au-dessus de nos têtes exaspèrent certains citoyens qui sont importunés par le bruit de ces gros porteurs. Comme en témoignent les chiffres fournis par Aéroport de Montréal (ADM), le nombre de survols d’aéronefs est en hausse de trimestre en trimestre depuis l’année 2015

Dans plusieurs grandes villes du monde, le trafic aérien est très réglementé, résultant d’années de mobilisation qui ont porté leurs fruits.

À Montréal, la construction des aéroports s’est faite sans prévoir de balises claires pour préserver et protéger la qualité de vie des citoyens. Une situation que déplore Pierre Lachapelle, porte-parole des Pollués de Montréal-Trudeau.

« La Chambre des communes, les députés et le gouvernement ont renié leur responsabilité par rapport au bien public sans baliser des choses précises pour la qualité de vie des citoyens. »

Une situation qui empire

On l’entend de plus en plus : plusieurs citoyens décrient une situation qui a semblé empirer au cours des dernières années. Certains ont même plié bagage et quitté tout simplement le vacarme de la Ville pour respirer l’air de la campagne.

David Desrosiers qui restait naguère du côté de l’arrondissement de Saint-Laurent est un de ceux-là.

« Je ne voulais plus vivre là. J’ai donc fait des recours pour carrément me débarrasser de la maison. Mais comme ce n’est pas un vice caché, mais que c’est quelque chose de public, je n’ai pas pu rien faire. J’ai finalement été obligé de partir », affirme-t-il.

D’autres personnes, au contraire, n’y voient guère d’inconvénient. Une citoyenne de Cartierville qui a préféré taire son nom explique que son mari n’a jamais été dérangé par le bruit des avions. Pour sa part, elle vit la situation beaucoup plus difficilement.

« J’adore le quartier et j’adore ma maison, mais c’est sûr que dans le moyen terme, j’envisage de déménager à cause de la nuisance sonore des avions. J’ai l’impression qu’on a sacrifié une bonne partie de la qualité de vie des résidants du quartier », déplore-t-elle.

Une autre dame, qui a également requis l’anonymat, qui a vécu plus de 40 ans dans l’arrondissement, regrette qu’on laisse aller la situation :

« Les sept dernières années ont été les pires depuis que je vis dans le quartier. Et ça ne semble pas changer ».

Silence radio

Il semble globalement planer un silence étrange lorsque vient le temps d’aborder le sujet de la nuisance sonore.

«Bien des citoyens refusent d’en parler de peur que cela ait un impact sur le prix de leur habitation », explique M. Lachapelle.

Journaldesvoisins.com a eu bien des difficultés à joindre des personnes acceptant de parler, même sous le couvert de l’anonymat, car ces dernières disaient craindre que cela n’affecte le prix de vente de leur maison.

Une courtière immobilière nous assure pourtant que le bruit des avions n’a pas d’impact sur la valeur des maisons. Dans sa pratique, elle n’a eu vent qu’à de très rares occasions de la nuisance causée par le bruit des avions.

« Des impacts, il n’y en a pas. Les acheteurs sont beaucoup plus influencés par la proximité du métro, l’environnement autour de leur propriété, les écoles, les parcs, etc. », explique Christine Gauthier, courtière immobilière chez RE/MAX.

Sonia Sultan, courtière immobilière pour Les Immeubles M.W. inc., reconnaît pour sa part que le bruit peut avoir un impact sur la valeur des habitations, estimant néanmoins que ce n’est pas toujours le cas.

« Je pense que, oui, ça peut avoir un impact. Par contre, il y a des habitations proches d’aéroports qui continuent d’être surévaluées. Il y a le bruit, oui, mais il y a aussi le client qui parfois n’est pas importuné par le bruit », explique-t-elle.

Ce que disent les études

Une étude menée par l’Université de Gand estimait que les vols de nuit sur l’aéroport de Bruxelles-Zaventem ont entraîné 215 décès pour la seule année 2002.

Enfin, selon une étude réalisée par la Direction de la santé publique (DSP) de Montréal en 2014, 9 % de la population montréalaise est très dérangée par le bruit généré par le transport routier, 6 % par le bruit des avions, et 2 % par le bruit des trains. Toujours selon la DSP, les preuves scientifiques les plus récentes démontrent que l’hypertension et les infarctus aigus du myocarde (« crises cardiaques ») peuvent également être causés par une exposition prolongée au bruit généré par le trafic routier et aérien.

Mieux encadrer

Dans leur demande de recours collectif disponible en ligne, Les Pollués de Montréal-Trudeau ont demandé que soit établi «le préjudice subi par chacun des membres du groupe visé », de faire respecter «le couvre-feu strict et rigoureux de 23 h à 7 h» et de prévoir des sanctions pour les aéroports qui ne respecteraient pas la réglementation. Même si ADM dit vouloir diminuer le nombre de vols de nuit, elle n’est pas tenue de le faire. La Cour a accepté d’entendre, en partie, le recours au cours des prochains mois.

Plusieurs capteurs de sons ont été installés par le groupe Les Pollués de Montréal-Trudeau dans l’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville pour mesurer en temps réel l’intensité du bruit dont les données sont compilées sur le site du Worldwide Aircraft Noise Services.

Tandis que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) recommande que les citoyens ne soient pas exposés à un bruit extérieur qui dépasse 55 décibels, ces capteurs sonores enregistrent assez fréquemment, depuis, des bruits de plus de 70 décibels en milieu de journée.

Cet article a été publié dans le mag papier de l’été 2017, et mis à jour par Christiane Dupont en août 2018.



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