
Jeune organisme à but non lucratif (OBNL) présent à Ahuntsic-Cartierville depuis près de deux ans, Zen dans ma tête multiplie des initiatives pour déconstruire des tabous ancrés au sein des communautés racisées sur les troubles liés à la santé mentale. Fondé par les sœurs Théodore, l’OBNL se distingue notamment par la création d’une affiche qui se veut inclusive : les amis de Manu.
Au-delà de l’intégration sociale, la question de la santé mentale est le spectre latent inhérent au choc culturel pour de nombreux immigrants.
« Non. Ça, ça n’existe pas. Ce n’est pas vrai. Ça, c’est des problèmes de blanc ! L’anxiété, ça n’existe pas ! » À travers cette assertion de certains parents, conséquence du biais culturel, qu’elles ont souvent entendue dans le cadre de leur tâche quotidienne, Manuela Rigaud Théodore, psychoéducatrice, souligne l’Everest qu’elles doivent déplacer.
L’organisme promeut la santé mentale à travers des activités de sensibilisation, d’éducation et d’expérimentation du bien-être émotionnel. Et, pour faire accepter ce problème de santé aux personnes qui sont dans la dénégation, elles font preuve d’ingéniosité multiforme.
Un balado pour semer le doute raisonnable
En effet, conscientes du fait que la mauvaise information se répand très facilement au sein des communautés migrantes, les sœurs Théodore ont démarré leur mission par la création d’un balado éponyme de l’OBNL. Le but étant de libérer la parole et de divulguer la bonne information. Et ce, grâce à la participation de personnes influentes des minorités visibles qui vivent ou ont vécu une situation donnée.
Ces prises de parole vont ainsi « semer un doute raisonnable » chez les parents qui réfutent l’existence de troubles psychologiques, soutient Manuela Théodore.
Déjà, deux saisons contenant 18 épisodes chacune ont été produites. Une troisième saison est en cours de réalisation, indique-t-elle.
Les amis de Manu
L’idée de créer les pictogrammes, Les amis de Manu, est venue d’une expérience personnelle aux deux sœurs : le rejet des images que montrait Fabiola à sa fille diagnostiquée déficiente intellectuelle légère. Par conséquent, pour faciliter l’apprentissage émotionnel à leurs enfants, Manuela Théodore a créé dans un premier temps une affiche qui leur ressemble.
Face au succès que cela rencontre auprès des patients de son cabinet, elle développe l’expérience. L’objectif est de coller avec la personne et de sentir que ça parle de soi, explique la psychoéducatrice.
Partant de ce principe, elle réalise 21 pictogrammes des différentes personnes raciales qui composent la société. Il existe des affiches émotionnelles multiraciales et des affiches simples. En fonction des demandes, elle continue de créer de nouveaux personnages comme « le dernier que je suis en train de faire : un enfant avec le vitiligo », indique-t-elle.
« Le But de ces pictogrammes émotionnels, c’est de permettre aux enfants de s’identifier au personnage et de les aider à comprendre leurs émotions, d’en discuter avec leurs parents… », souligne Fabiola Théodore. « En effet, quand on est capable de mettre des mots sur ce qu’on ressent, c’est plus facile d’aller chercher de l’aide. »
Pourquoi attendre que ça fasse mal ?
Le tabou autour de la santé mentale représente un danger à plus ou moins long terme. L’organisme insiste sur la sensibilisation et l’éducation, notamment pour déconstruire la dénégation qui a fait son lit chez certaines personnes. À cet effet, Zen dans ma tête organise des ateliers de formation et participe à des événements publics, comme la fête du quartier qui s’est tenue au parc Ahuntsic.
Ces fondatrices espèrent ainsi aider les personnes qui n’ont pas une bonne assurance au travail ou 400 $ pour se payer les services au privé. De ce fait , avec cette approche, celles-ci ont des notions pour la prévention d’une crise.
« Cela réduit l’écart avec les populations vulnérables et ainsi on peut faire une différence, » confie Manuela.
« L’organisme sans but lucratif veut être un pont entre le système officiel (école, garderie, hôpital) et les parents grâce à une approche humaine moins formelle, » explique Fabiola.
En plus d’un vox pop durant la fête de la jeunesse au parc Ahuntsic, l’OBNL a organisé une dizaine d’activités, dont l’une a eu lieu à l’école La Dauversière-Évangéline.
Activité socioémotionnelle avec les enfants, activité et conférence sur le stress et l’anxiété, camping sauvage, atelier bracelet intentionnel pour cultiver l’estime de soi.
Selon les données de l’Institut de la statistique du Québec publiées en novembre 2024, les troubles mentaux confirmés par un professionnel ou une professionnelle de la santé chez les jeunes du secondaire de la province ont significativement augmenté entre 2010-2011 et 2022-2023. En effet, ils sont passés du simple au double dans la plupart des cas étudiés. Ainsi, le trouble anxieux est passé de 9 % en 2010-2011 à 20 % en 2022-2023.
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