Les organismes communautaires sont des portes d’entrée pour les personnes dans le besoin. Pour Péguy Flore Pierre, ils ont été aussi un moyen rapide lui permettant de passer de demandeuse d’asile à citoyenne active. Pour elle, leur regroupement à la même adresse a été un élément déterminant.

Arrivée comme demandeuse d’asile, Péguy Flore Pierre est devenue coordonnatrice du Comité local d’accueil des demandeurs d’asile d’Ahuntsic. Photo : Amine Esseghir / JDV

Devant le rassemblement pour défendre le centre communautaire sur la rue Laverdure, Péguy Flore Pierre se présente.

«Je suis la coordonnatrice du Comité local d’accueil des demandeurs d’asile d’Ahuntsic, le CALDA. Il y a deux ans, j’étais accueillie par les organismes [communautaires] en tant que personne qui demande l’asile.»

Si beaucoup de gens sont rassemblés, ce 22 mai, devant le centre communautaire, c’est parce qu’il est en passe d’être récupéré par son propriétaire, le Centre de services scolaire de Montréal (CSSDM). Il veut en faire un centre de francisation. La douzaine d’organismes qui y est hébergée depuis plus de 20 ans risque d’être éparpillée dans le quartier.

L’aventure de Mme Pierre commence un jour de décembre de 2021. Accompagnée de sa mère, elle entame son exil en passant par le chemin Roxham. Deux jours auparavant, elle venait d’atterrir à New York, en provenance d’Haïti, sans aucune intention de rester aux États-Unis. Sans ressource, elle est accueillie place Dupuis avec d’autres exilés avant de trouver un logement à Ahuntsic.

Une seule adresse pour tout

Mme Pierre a besoin de tout. Dans les locaux du Programme régional d’accueil et d’intégration des demandeurs d’asile (PRAIDA), également situé à Ahuntsic, elle se fait remettre une liste d’organismes qui peuvent la soutenir. À Ahuntsic, ils sont faciles à trouver, ils sont logés au même endroit.

Elle frappe d’abord à la porte du Carrefour d’aide aux nouveaux arrivants (CANA).

«Quand je suis arrivée, je n’avais aucun sou, juste l’aide sociale, lance Mme Pierre. J’ai toujours été accueillie comme une personne… avec ma dignité.»

Le fait que ces organismes se parlent rapidement a été essentiel dans son cheminement vers l’intégration.

«Mon expérience illustre tout à fait la nécessité d’avoir tous les organismes réunis. Quand ils accueillent les gens, cela a vraiment un impact. J’en suis la preuve.»

Ce que Mme Pierre veut absolument mettre en évidence, c’est ce processus qui transforme.

«Aujourd’hui, nous ne faisons pas que demander. Le passage d’une personne qui demande l’asile à un réfugié accepté, cela a été mon cheminement avec les organismes. Ils sont au cœur du changement. [Sans eux] cela aurait été plus difficile, plus long et plus compliqué d’y parvenir. En dehors des organismes, je n’ai pas vu le gouvernement. Ce sont les intervenants que j’ai vus.»

Redonner

Mme Pierre reproduit, deux ans après son arrivée à Montréal, ce qu’elle a vécu et ce qu’elle a appris en discutant avec les intervenants réunis au centre communautaire.

En tant que coordinatrice du CALDA, elle doit parler à tous les organismes qui reçoivent des demandeurs d’asile.

«Aujourd’hui, les organismes qui m’ont aidée, je les encourage. Je les aide à mutualiser leurs ressources pour continuer d’accueillir les personnes qui arrivent et qui n’ont absolument aucune connaissance du fonctionnement de la société, de l’administration, qui sont aux prises avec des difficultés en plus et qui ont besoin de réponses et de soutien.»

«Les gens qui ont des besoins, une fois qu’ils se sont stabilisés, qu’ils ont les moyens de s’en sortir, ils peuvent tout à fait être efficaces dans la société.»

Éparpillement en cours ?

Le milieu communautaire demande un sursis de cinq ans pour le centre situé rue Laverdure. L’objectif est de maintenir les services au même endroit avant de trouver un nouveau local.

Le milieu communautaire a reçu l’appui des députés provinciaux Haroun Bouazzi et André Morin, de la députée fédérale Mélanie Joly et de la mairesse de l’arrondissement Emilie Thuillier. Ils et elles ont signé une lettre exhortant le gouvernement du Québec à donner cinq ans de plus aux organismes qui traitent les demandes de 25 000 personnes annuellement.

Alors que le centre vit sous l’épée de Damoclès depuis 2017, des organismes ont acheté ou loué des locaux pour assurer la poursuite de leurs activités. Rue Action Prévention (RAP) jeunesse, le Carrefour d’aide aux nouveaux arrivants (CANA) et Relax Action Montréal devraient s’installer au 880, boulevard Henri-Bourassa Est. RePère, un organisme d’aide aux pères, a acheté aussi un édifice, sur le boulevard Henri-Bourassa également. Le Centre de ressources périnatales Autour du bébé a déménagé sur la rue Fleury Est.

Cet article a été tiré du numéro d’été du Journal des voisins (version imprimée) dont le dossier principal est consacré au logement.



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Jocelyne Grenier
Jocelyne Grenier
3 Mois

J’ai connu Péguy Flore Pierre au CANA où elle était bénévole pour participer à un jumelage d’aide à la francisation en janvier 2023.
J’ai bien apprécié cette personne joviale et enthousiaste dont je ne connaissais pas le parcours d’immigration.
Elle a su redonner au suivant très rapidement.
Toutes mes félicitations pour son implication sociale après un cheminement difficile en tant que réfugiée.
Elle a toute mon admiration.

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