
Deux rencontres entre le ministère de l’Éducation et Solidarité Ahuntsic ne donnent pas les résultats espérés. Une communication du directeur de Solidarité Ahuntsic aux organismes du centre met en lumière les résultats des discussions.
Rémy Robitaille informe les organismes qu’une nouvelle procédure judiciaire contre les treize organismes du centre est entamée par le Centre de services scolaire de Montréal (CSSDM). Il indique dans la communication envoyée aux organismes « qu’il ne s’agit pas d’une ordonnance de sauvegarde, comme nous l’attendions, mais plutôt d’une injonction interlocutoire. La grande différence entre ces deux procédures est que la dernière est beaucoup moins rapide et nécessitera plusieurs semaines, voire des mois, avant d’aboutir sur une audience et un jugement ». Il indique aussi que les avocats de la défense travaillent déjà sur le dossier.
La 2e rencontre
Après plusieurs refus pour une rencontre avec le ministère de l’Éducation (MEQ), Solidarité Ahuntsic a pu rencontrer les représentants gouvernementaux.
La 2e rencontre avec le MEQ a eu lieu le lundi 3 février. Le résultat de la vérification du MEQ qu’avait demandée Solidarité Ahuntsic — à savoir si toutes les possibilités avaient été envisagées — n’a pas donné les résultats escomptés. Les représentants du MEQ ont affirmé que le bâtiment du Centre communautaire Ahuntsic était bel et bien la seule solution pour le CSSDM. Dans ces circonstances, ils ont indiqué qu’ils n’interviendraient pas contre la reprise du bâtiment.
Un compromis possible
Le directeur de Solidarité Ahuntsic a offert au MEQ et au CSSDM un partenariat inédit avec les groupes communautaires qui occupent le centre. « L’offre consiste, pour débuter, à leur offrir gratuitement l’équivalent de six classes de francisation. Ils n’auraient pas non plus à couvrir les frais de conciergerie et de sécurité. Grâce à la présence des organismes communautaires, des services d’aide et d’accompagnement pourraient également être offerts aux étudiants du CSSDM (aide au logement, halte-garderie, dépannage alimentaire, etc.). Il s’agit d’une offre de partenariat “gagnant-gagnant”, même pour les futurs étudiants du CSSDM. » Il reste à voir si les représentants gouvernementaux donneront suite à l’intérêt manifesté. Une nouvelle rencontre aura lieu dans les prochaines semaines.
Rappel des faits
Le contentieux juridique de Solidarité Ahuntsic avec son bailleur, le CSSDM, porte sur 600 000 $ d’arriérés de loyer. En fin d’année, ce dernier a émis un avis de fin de bail prenant effet au 27 décembre 2024.
Or, à ce jour, les 13 organismes communautaires logés au Centre communautaire Ahuntsic continuent de fournir leurs services à une population estimée annuellement à 25 000 usagers.
La mobilisation
À sa dernière assemblée générale, qui s’est déroulée le 21 janvier dernier au centre communautaire, rue Laverdure, Solidarité Ahuntsic a pu constater lors de la table de concertation intersectorielle la détermination de ses troupes, venues en grand nombre.
Au cours de cette assemblée, les personnes présentes croyaient que ce serait une « ordonnance de sauvegarde » qui serait le moyen envisagé par le CSSDM pour évincer les organismes.
Plusieurs propositions de mobilisation sont évoquées à la réunion. Une personne de l’assistance propose de rédiger un communiqué de presse hebdomadaire pour tenir informés les membres et la population des démêlés en cours. Une deuxième mise sur la création d’une banque de données afin de mobiliser la population locale en grand nombre le moment venu. Pourquoi ne pas organiser une manifestation devant la station de métro Henri-Bourassa, suggère une troisième.
Une quatrième intervenante évoque la possibilité d’occuper les lieux si une décision défavorable survient prochainement. « Des comités de logement l’ont fait avant nous, argumente-t-elle. C’est un espace essentiel, c’est tout le tissu social qui est menacé. » Enfin, dans le public, une sixième voix se fait entendre : « Pourquoi ne pas utiliser des formulaires Google [Google Forms] pour solliciter les usagers afin qu’ils joignent une photo d’eux avec une pancarte indiquant une raison pour laquelle il est nécessaire de maintenir nos activités ici? »
Comme en témoigne l’effervescence émanant de l’assemblée, de toute évidence, l’épée de Damoclès suspendue au-dessus des représentants du milieu communautaire crée une inquiétude palpable.
« Nous avons mis en place un comité pour une mobilisation générale pour lancer des actions, c’est la seule façon de résister face à l’adversité », explique Brigitte Robert, responsable des communications de Solidarité Ahuntsic.
Un plan de déménagement en cours
« Nous, c’est-à-dire tous les élus du quartier, à tous les niveaux, le provincial, le fédéral, le municipal, nous interpellons le gouvernement du Québec, indique, de son côté, au Journal des voisins la mairesse d’Ahuntsic-Cartierville, Emilie Thuillier. Les 13 organismes qui sont ici [rue Laverdure] donnent des services exceptionnels et essentiels à la communauté et doivent rester là jusqu’à ce qu’ils trouvent un autre endroit. »
Emilie Thuillier poursuit : « Nous avons déjà un autre plan, nous travaillons dessus. Ce n’est pas dans 15 ans, puisqu’il s’agit du 9515 Saint-Hubert, que la Ville va démolir dans les prochains mois. Nous avons changé le zonage dans cette optique. Le projet de centre communautaire est déjà accepté au niveau de l’urbanisme. La Société de développement Écoquartier Louvain (SDÉL) est en train de chercher le montage financier. Par conséquent, il existe bien un plan pour un déménagement. Nous demandons que le centre communautaire reste ici, le temps de pouvoir déménager. »
D’ailleurs, complète-t-elle, « le CSSDM nous a dit qu’après la reprise des lieux, trois ans de travaux au minimum seraient nécessaires pour faire des classes de francisation. Selon ses normes, il ne peut pas arriver demain matin et faire ce genre d’activités, car l’édifice est vétuste ».
En somme, « si c’est si urgent que ça, le gouvernement du Québec doit prendre acte et donner l’argent nécessaire au CSSDM pour louer ailleurs. Dans l’arrondissement, il existe des locaux beaucoup plus adéquats avec une accessibilité universelle et des ascenseurs ».
Le député de l’Acadie, André A. Morin, est lui aussi en accord avec le fait qu’il est nécessaire de laisser du temps pour trouver une solution. « Puis, si vous vous rappelez la lettre que les élus ont signée, ce qu’on demandait au fond au gouvernement du Québec, c’était du temps pour qu’il y ait un autre local disponible pour aider les populations vulnérables et les gens marginalisés, » rappelle le député.
Haroun Bouazzi, député de Maurice-Richard, soutient lui aussi depuis le début les demandes de Solidarité Ahuntsic. Il craint entre autres choses la perte du filet social et communautaire du quartier.
Collaboration Amine Esseghir et Nora Azouz.
Cet article est paru dans la version papier du JDV hiver 2025.
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