(Photo : Jules Couturier, JDV)

Journaldesvoisins.com a interviewé récemment Marwah Rizqy, députée de Saint-Laurent pour le Parti libéral du Québec, détentrice d’un doctorat en droit fiscal ainsi que d’une maîtrise en fiscalité internationale; avide lectrice du journaldesvoisins.com et membre de la Commission sur l’avenir des médias. Mme Rizqy se penche sur les solutions possibles à la crise actuelle des médias. Les citoyens de Cartierville sont des citoyens du territoire de la circonscription de la députée de Saint-Laurent.

Publiée dimanche en ligne, la première partie de l’entretien avec la députée de Saint-Laurent se concentrait sur l’importance des médias, et particulièrement des médias locaux.

Rappelons que la députée de Saint-Laurent a mentionné notre média en août dernier alors qu’elle participait aux travaux sur l’avenir des médias à la Commission de la culture et de l’éducation de l’Assemblée nationale du Québec.

La députée de Saint-Laurent, Marwah Rizqy (Photo: archives jdv)

En tant qu’experte en fiscalité, Mme Rizqy en avait long à dire sur la crise des médias, ses causes et ses possibles solutions. Journaldesvoisins.com l’a jointe à son bureau.

La députée condamne la concurrence complètement déloyale entre nos médias québécois et les géants du web, les Google, Apple, Facebook, Amazon (GAFA).

La publicité qui apparaissait autrefois dans les médias locaux est maintenant affichée sur Facebook et autres géants du Web qui vampirisent 80 % des revenus publicitaires et ne payent pas un dollar d’impôt, ce qui constitue pour Mme Rizqy une grave inégalité fiscale. Les gains de ces entreprises se font au détriment des médias nationaux, régionaux et locaux.

L’impôt sur le revenu

En tant que membre de l’Opposition officielle, Mme Rizqy réclame que les GAFA paient leur juste part d’impôt sur leurs revenus.

« Il n’est pas normal qu’une entreprise comme Facebook fasse un peu plus de trois milliards de dollars au Canada et ne paie pas un dollar d’impôt », dit-elle.

Mme Rizqy propose donc d’aller dans le même sens que la France qui a récemment adopté la taxe sur les services numériques, dite taxe GAFA. C’est une taxe de 3 % sur les recettes tirées des prestations de ciblage publicitaire (ndlr: publicités), qui permettrait à l’État de récupérer plusieurs centaines de millions de dollars.

Journaldesvoisins.com se décline en deux supports: les Actualités Web sur mobile, tablette et ordi; et le mag papier bimestriel. Photo: Jules Couturier (jdv)

De l’argent qui traîne

Marwah Rizqy rappelle que le Parti libéral du Québec avait légiféré lors de la bataille sur la taxe Netflix en 2018 et avait ainsi permis une entrée d’argent de 65 millions de dollars dans les coffres du gouvernement québécois. Si Ottawa avait emboîté le pas, ce qui n’a pas été fait car le premier ministre Trudeau disait ne pas vouloir taxer [NDLR : TPS] la classe moyenne sur leur abonnement Netflix, le gouvernement fédéral serait allé chercher des gains de 169 millions de dollars. C’est un calcul qui a été fait par le bureau du Vérificateur général du Canada.

Mme Rizqy a fait une règle de proportion avec le pourcentage de la population. Si 23 % de la population du Canada habite au Québec, le gouvernement fédéral devrait 38,9 millions de dollars aux Québécois. Mme Rizqy estime que si Ottawa ne veut pas de cet argent, le gouvernement du Québec devrait occuper le champ laissé vacant par le fédéral en matière de taxation et récupérer l’argent laissé sur la table.

Sa collègue Isabelle Melançon, porte-parole de l’Opposition officielle en matière de culture et de communications, propose d’avoir un fond dédié pour véritablement aider les médias. Ce fonds comprendrait l’argent de l’impôt sur le revenu des GAFA ainsi que de la taxe de vente (Netflix) qu’Ottawa laisse vacante.

Payer les journalistes pour leur contenu

La députée de Saint-Laurent et fiscaliste a aussi pensé à une autre solution. Elle souhaiterait que les journalistes québécois touchent une redevance pour le contenu qu’ils préparent et qui est utilisé par Facebook.

« Souvent, on relaie de l’information sur Facebook, ce qui est bien dans la mesure où ça fait en sorte qu’un article soit davantage lu. Par contre, un montant d’argent devrait être attribué par Facebook aux journalistes pour la création de contenu de qualité », explique-t-elle.

La fiscaliste a fait le calcul et estime à quelque 20 millions de dollars la valeur du contenu créé par les journalistes québécois. Le fondateur de Facebook Mark Zuckerberg a lui-même confirmé que des parts de profit de son entreprise étaient générées grâce au contenu conçu par les médias.

Placer sa pub chez nous

Enfin, une dernière solution envisageable, qui pourrait donner un coup de pouce aux médias locaux, concerne la publicité. Marwah Rizqy et sa collègue Isabelle Melançon ne font pas de publicité sponsorisée sur Facebook. Mme Melançon a d’ailleurs sensibilisé tout son caucus à l’importance de ne pas mettre de publicité gouvernementale sur les sites des GAFA tant qu’ils ne paieront pas d’impôts. Mme Rizqy croit qu’il faut plutôt acheter local, en mettant les publicités gouvernementales dans les médias québécois.

« On est 125 députés avec un budget assez important pour la publicité. Si nous nous concertons tous pour ne plus faire de publicité sponsorisée sur Facebook mais uniquement dans nos médias locaux, je crois que ça peut faire une différence », dit-elle.

La CAQ n’est pas réceptive

Lorsque ces solutions ont été plaidées devant la Commission sur l’avenir des médias, tous les autres députés des partis d’opposition ont emboîté le pas et réclamé la même chose. Le parti au pouvoir, la CAQ, n’a par contre rien dit sur le sujet.

« La seule personne qui a parlé, et qui n’aurait pas dû car elle ne siégeait pas sur cette commission, est le chef du parti François Legault… et c’était pour fermer la porte. Je n’ai pas du tout aimé cette interférence », dit Mme Rizqy.

Le premier ministre du Québec dit vouloir attendre de voir ce qu’Ottawa va faire avant de se prononcer sur les solutions face à l’avenir des médias. Marwah Rizqy, de l’Opposition, croit que l’on n’a pas le temps d’attendre.

« Depuis le début du mandat fédéral, on laisse la presse écrite mourir. Ils doivent des comptes et ils les doivent rapidement », tranche-t-elle.



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