(Photo : Philippe Rachiele, JDV)
La rue Cousineau durant les inondations du printemps (Photo : Archives jdv)

Les deux opposants à la mairie locale dans Ahuntsic-Cartierville ont réagi fort différemment au lendemain de la publication des deux premiers volets du rapport intérimaire de la Commission sur l’aménagement de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) portant sur les inondations du printemps dernier. Journaldesvoisins.com vous a présenté ce premier document il y a quelques jours.

Harout Chitilian, de l’Équipe Denis Coderre, (et vice-président du comité exécutif de Montréal) a fait siennes les propositions soumises dans le rapport de 80 pages dévoilé jeudi dernier alors qu’Émilie Thuillier, conseillère du district d’Ahuntsic, de l’Équipe Valérie Plante de Projet Montréal, insistait pour dire que s’il y a eu commande d’un rapport, c’est que bon nombre de ratées sont survenus dans les interventions de la Ville.

Il faut dire que les deux protagonistes, qui ont rapidement réagi à la demande du journaldesvoisins.com pour obtenir une réaction, livraient leurs commentaires le jour même du lancement officiel de la campagne électorale pour la municipale montréalaise du 5 novembre.

Le rapport intérimaire de la CMM est tombé alors qu’une douzaine de familles de l’arrondissement sont toujours hébergées à l’extérieur de leur domicile pour cause d’inondation.

Chitilian confiant

Harout Chitilian, qui est présentement conseiller municipal de Bordeaux-Cartierville, a pris acte du document qui le rejoint :

« Ce document est de la musique à mes oreilles. En tant qu’ingénieur, vous savez à quel point j’aime m’appuyer sur des données et des faits. Et ici, il y a des points cruciaux qui sont relevés ».

Il souligne entre autres que le rapport est «très lucide» relativement aux façons de faire dans l’avenir, en parlant de cadre de référence pour la méthodologie à employer pour les cotes de crues.

« Quand on parle de modélisation hydraulique pour les cours d’eau de la région,  c’est un débat contemporain. Mais pour parvenir à s’entendre tous sur une nouvelle approche, nous avons aussi besoin de l’appui du gouvernement du Québec », a-il plaidé.

Ainsi, comme le dit le rapport, il y aurait avantage à ce que les données de bases soient  communes à toutes les municipalités touchées.

Et des intervenants aimeraient bien que l’on ressuscite le Centre d’expertise hydrique du Québec, qui avait été dissout pour être intégré au ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. 


EXTRAIT DU RAPPORT

9.1 Constats généraux

  • Lors des inondations printanières de 2017, des écarts importants entre les niveaux de crues réels et théoriques ont été constatés.

La principale source de ces écarts est la méthodologie utilisée.

Pour établir les récurrences de 20 ans et de 100 ans, qui ne tient pas compte de la gestion des ouvrages de retenue et qui projette dans le futur des paramètres empiriques qui ne correspondent pas toujours à la réalité d’aujourd’hui.

  • Au cours des 40 dernières années, l’implication du gouvernement du Québec a diminué progressivement en ce qui concerne la réalisation d’études menant à la détermination des cotes de crues et à la cartographie des plaines inondables. Ce désengagement graduel a d’ailleurs conduit plus récemment à la dissolution du CEHQ, qui avait à l’époque la mission de réaliser lesdites études et lesdites cartes, alors que présentement, les différentes unités administratives au sein du MDDELCC ne font que valider les études locales présentées par les diverses municipalités et les MRC.

9.2 Cartographie et cotes applicables

  • Alors que le nombre d’inondations majeures augmente constamment, il n’existe à ce jour aucun outil opérationnel de cartographie et d’analyse du risque lié aux inondations.
  • La technologie est maintenant disponible pour modéliser et cartographier en temps réel les risques d’inondation (cartographie dynamique).
  • Pour des cours d’eau majeurs tels que la rivière des Outaouais, le fleuve Saint-Laurent ou la rivière Richelieu, il devient important de s’assurer d’une approche concertée et coordonnée dans la détermination des plaines inondables.

Source: Rapport intérimaire de la Commission de l’aménagement de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) sur les inondations, p. 59)


«Nous avons eu à faire face à une situation exceptionnelle. Ce fut une tragédie pour certaines familles, mais nous avons un processus transparent  et comme a dit le maire Coderre, il ne faut pas partir en peur parce que nous avons vécu une période exceptionnelle », a insisté Harout Chitilian.

En attendant, celui qui a l’un des plus hauts postes à l’hôtel de ville acquiesce à l’idée de prévoir davantage de construction d’ouvrage de retenues d’eau (c’est déjà commencé), rappelant que les stations de pompage ne pouvaient plus suffire à la tâche dans les secteurs comme la rue Beauséjour au plus fort des crues printanières.

Des murs de soutènement à modifier ou consolider seraient aussi bienvenus s si l’on décode ses propos.

Le rapport insiste sur le fait que dans certains cas, « Il peut s’avérer nécessaire d’envisager des interventions ponctuelles de retenue d’eau dans les secteurs les plus vulnérables ».

Thuillier insatisfaite

Du côté de Projet Montréal, la conseillère du district d’Ahuntsic, Émilie Thuillier, qui est également candidate à la mairie de l’arrondissement, a reconnu qu’une réflexion s’impose à la suite des tristes épisodes du printemps dernier, dont se rappelleront longtemps bon nombre de résidants.

Mme Thuillier n’hésite pas à revenir sur cette période mouvementée, décochant plusieurs flèches à l’endroit de l’administration municipale, qui, selon elle n’était vraiment pas «bien préparée» pour faire face à un tel événement.

« Je suis allée sur place et j’ai constaté le désarroi des familles aux prises avec les inondations. Les gens attendaient de l’aide. Ceux qui se sont le mieux tirés d’affaires étaient ceux qui par eux-mêmes ont installé des sacs de sable. Souvent, les interventions des autorités ont eu lieu après-coup » a-t-elle déploré.

Selon elle,  l’information a manqué et la Ville a été dépassée par l’ampleur du phénomène.

« Ils ont pris des photos aériennes, tant mieux, cela va servir », a-t-elle mentionné.

Mais pour conclure, elle convient qu’il y a des choses qui devront changer pour prévenir et s’assurer que la Ville soit prête à toute éventualité.

Les tristes épisodes d’inondations survenues quelques semaines avant l’été ont causé beaucoup de soucis : des gens ont dû être relocalisés le temps d’assécher leurs résidences et de rénover. Des bâtiments, des terrains, des infrastructures et quoi d’autres, ont été affectés.

Des dizaines de résidants de Cartierville, localisés sur des rues situées à l’ouest du pont Lachapelle ont goûté à l’amère médecine. Pour certains toutefois, ce n’était pas une première.

La facture est en bout de piste salée pour tout le monde.

Cartes des zones inondables

Il y a certes de la prévention à faire, notamment avec l’aide la carte des zones inondables.

Le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques a sur son site Web une carte interactive du Québec détaillant les zones inondables de tout le territoire.

De nouvelles cartes seront refaites à la lumière des nouvelles données, des méthodes à peaufiner, notamment grâce aux nouvelles technologies. Les infos permettent d’avoir une bonne idée des risques d’inondations dans des secteurs problématiques.

Ici, dans l’arrondissement

Richard Blais, Chef de division Urbanisme, permis et inspections, à l’arrondissement, a indiqué qu’une fois que sera prête la nouvelle carte, chaque ville ou arrondissement désirant l’adopter devra modifier son règlement d’urbanisme en conséquence.

Pour l’instant, ici, dans l’arrondissement, on se fie notamment aux deux cartes et un tableau des cotes de crue. Pour notre secteur, sur le bord de la Rivière-des-Prairies, le territoire est divisé en dizaines de sections. La dernière carte de référence pour notre arrondissement (et la région) remonte à 2006.

Chaque section compte ce qu’on appelle des cotes de crue, pour des risques sur  2, 20 et 100 ans.  Ainsi, dans la zone 20 ans, on a une chance qu’une catastrophe survienne en 20 ans.

« Sur la carte, explique M. Blais, il y a des points de repères le long de la rive. L’arpenteur, chargé de réaliser le relevé d’une propriété, identifie le repère correspondant à l’emplacement de la propriété en question et obtient ainsi les cotes de crue (niveaux du sol) correspondantes dans les tableaux qui sont joints à la carte.  Par la suite, il mesure le niveau du terrain à plusieurs endroits et détermine si le niveau se situe au-dessus ou sous le niveau de crue de 2, 20 ou 100 ans. Il peut ensuite établir la position des lignes de hautes eaux, grand courant et faible courant sur le plan de la propriété qu’il prépare, le cas échéant. C’est un travail très technique qui doit être réalisé par un arpenteur géomètre qui utilise ses appareils de mesure des niveaux de terrain », a tenu à préciser l’expert des questions urbanistiques à l’arrondissement.

Secteurs à risques

Mais la question que bien des gens se posent, c’est de savoir s’il y a bel et bien des secteurs à risques dans l’arrondissement? Dans un tel cas, cela peut poser un problème quand on demande un permis à l’arrondissement.

« Nous n’avons pas identifié de “secteur à risque”, nous a confirmé Richard Blais. Lorsqu’une propriété pour laquelle un permis est demandé est située à proximité de la rivière, nous demandons au requérant de faire préparer les relevés topographiques. Ainsi, chaque propriété est analysée selon les cotes de crues de manière à éviter que des ouvrages soient érigés de manière non conforme aux lois et règlements.

Selon M. Blais, des ouvrages peuvent être érigés en zones inondables, mais à certaines conditions.

« Un permis n’est délivré que si les travaux projetés sont conformes à la réglementation. Autrement, le permis peut être refusé ».

 

 



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