La Covid-19 a eu raison de la Maison du Pressoir. Le monument historique ne rouvrira que l’été prochain.
Normalement, la Maison du Pressoir, qui fait partie d’un ensemble de constructions historiques situées dans le Parc nature de l’Île-de-la-Visitation et du village du Sault-au-Récollet, est accessible au public de la fête des Patriotes jusqu’à l’Action de grâce. Le rez-de-chaussée est consacré à un musée qui relate l’histoire du Sault-au-Récollet et du site des moulins, un endroit unique au Québec et un des rares qui remonte à la Nouvelle-France. L’étage abrite une salle de réunions.
Ce bijou patrimonial est aujourd’hui administré par le Service des grands parcs de la Ville de Montréal, et non l’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville. L’animation du musée a été confiée pendant une quinzaine d’années à l’OSBL Cité historia, qui a fait faillite en 2015. L’OBNL GUEPE avait repris le flambeau, avait alors rapporté votre média, Journaldesvoisins.com.
Il y a quelques semaines, Stéphane Tessier, un guide touristique qui y a animé de nombreuses visites de groupes scolaires, nous écrivait pour se désoler que les lieux ne soient plus accessibles à la population.
« Le bâtiment est chauffé et entretenu, aux frais des contribuables, mais il n’y a aucune exposition pour mettre en valeur ce site exceptionnel, affirme-t-il. On nous répond que l’immeuble est trop exigu pour permettre l’accès au public en ces temps de pandémie. C’est une réponse infantilisante et plutôt facile pour se désengager du dossier. »
M. Tessier estime que les responsables n’ont pas la compétence pour gérer les aspects culturels et historiques de ce lieu unique. Il soutient que la Maison du Pressoir devrait être accessible à l’année, pas seulement l’été.
Manque de transparence
La Société d’histoire d’Ahuntsic-Cartierville (SHAC) a déposé une offre pour gérer l’animation de la Maison du Pressoir, soutient un de ses membres, Yvon Gagnon, mais le projet a été abandonné à cause de la Covid-19. M. Gagnon souligne que les relations avec l’administration montréalaise ne sont pas faciles dans ce dossier :
« On est pris dans une sorte de labyrinthe administratif, dit-il. On n’a aucune idée de la volonté des décideurs dans ce dossier. C’est une gestion obscure… »
À la Ville de Montréal, on s’est contenté de nous confirmer la fermeture de la Maison du Pressoir pour cause de pandémie. Mais elle rouvrira ses portes pour l’été 2021, indique le relationniste Cédric Essiminy par courriel, sans aucune autre explication.
Un fonctionnaire de la division de la gestion des parcs-nature, qui n’a pas l’autorisation de parler aux journalistes, nous a cependant confirmé cette réouverture. Et que ce service privilégiait un OBNL à vocation sociale, puisque la Ville a le droit d’autoriser des ententes de gré à gré sans passer par des appels d’offres lorsqu’il s’agit d’organismes d’économie sociale. Il nous indique également que la fermeture la Maison du Pressoir est liée à celle de tous les immeubles d’accueil situés dans des parcs montréalais pour cause de pandémie, à l’exception des sanitaires.
« Je comprends pourquoi les lieux ne sont plus accessibles au public, car il s’agit d’un petit immeuble dépourvu de ventilation industrielle, explique Jérôme Normand, conseiller dans Ahuntsic-Cartierville. Élus et fonctionnaires doivent respecter les directives de la Santé publique, en fonction desquelles cette maison n’a pas été jugée sécuritaire pour le public. »
M. Normand révèle qu’un appel d’offres pour l’animation de la maison est prévu pour le début de 2021 et que l’administration souhaite en bonifier l’offre.
Signalons que la Maison du Meunier, située à un jet de pierre de la Maison du Pressoir, rouvrira également ses portes l’été prochain. Cette dernière abrite un café au rez-de-chaussée, administré par l’OBNL La Corbeille. La terrasse du bistro, qui surplombe des rapides situés sous la canopée entourant l’immeuble patrimonial, est considérée comme une des plus spectaculaires de la métropole.
À la Ville de Montréal, une source nous indique que le contrat avec La Corbeille devrait normalement être renouvelé, car on se dit fort satisfait de la prestation de cet organisme. À l’étage, inaccessible au public, la Maison du Meunier abrite des bureaux administratifs du Service des grands parcs.
Immeuble de grande valeur
Classée immeuble patrimonial en 1978, restaurée en 1987 par la Communauté urbaine de Montréal (CUM), la Maison du Pressoir fut construite de 1806 à 1821 pour abriter un pressoir à cidre, pour le meunier Didier Joubert. Les Sulpiciens lui avaient octroyé cet emplacement. En 1726, ces derniers avaient aménagé une digue et des moulins pour profiter du potentiel hydraulique des rapides situés sur le site. Entre 1842 et 1846, l’immeuble fut transformé en habitation par le cultivateur et tanneur Benjamin Arel. En 1969, la partie nord-ouest fut démolie et reconstruite pour restituer à l’immeuble ses dimensions originales.
La Maison du Pressoir fut érigée avec une technique de construction aujourd’hui assez rare, qui combine une charpente en bois et de la maçonnerie. Le Répertoire du patrimoine du Québec explique que la technique à colombage pierroté, très répandue dans le Québec du XVIIe au XVIIIe siècle, provient de France et remonte au Moyen-Âge. Elle fut importée ici par les premiers colons français.
L’immeuble a déjà abrité deux pressoirs, ce qui permettait de produire du cidre à l’année, issu de pommes provenant de vergers de toute la région métropolitaine. Les pressoirs étaient actionnés de manière hydraulique.
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