(Photo: Philippe Rachiele, JDV)
Quand j’étais petite et que nos parents nous amenaient visiter de la parenté au village natal de mon père, dans l’Outaouais, il nous parlait parfois de la ferme de sa grand-mère et de l’immense jardin potager bordé de fleurs dont elle s’occupait assidûment dans les années 1930.
Cet article est paru dans la version imprimée du Journal des voisins, le Mag papier de juin-juillet 2023, aux pages 30-31.

La famille de mon père habitait le village et leur petit terrain ne permettait pas d’avoir un si grand jardin… Il avait peut-être idéalisé la grandeur du jardin de sa grand-mère, mais c’était demeuré un très bon souvenir pour lui.

Ma mère de son côté nous parlait du petit potager que ses parents entretenaient dans les années 1930 et 1940, près du hangar, dans leur petite cour en ville, ainsi que du jardin de leurs voisins italiens. Ces derniers leur apportaient parfois des légumes méconnus… probablement issus de semences provenant de leur pays d’origine!

Le jardin communautaire du parc Jean-Martucci. (Photo: François Robert-Durand, JDV)

Les jardins potagers de nos arrière-grands-mères (puisque c’était principalement les femmes qui s’occupaient de ces jardins comme elles ne travaillaient pas à l’extérieur!), que ce soit à la campagne ou en ville, étaient des jardins de subsistance, qui demandaient beaucoup de travail et la collaboration des membres de la famille. Ils étaient essentiels parce que c’était, pour plusieurs familles, pratiquement la seule façon d’avoir des aliments frais. Ils permettaient également que la famille ait un régime alimentaire plus varié et qu’elle puisse faire des provisions pour l’hiver.

Les pépinières et centres-jardins n’existaient pas à l’époque… En femmes pratiques, nos aïeules conservaient leurs semences (patrimoniales, il va sans dire) d’une année à l’autre, ou les commandaient après avoir épluché les catalogue des semenciers durant l’hiver. Elles commençaient leurs semis à l’intérieur lorsque nécessaire, les plaçant près des fenêtres. Elles n’avaient alors pas tout l’équipement qui est maintenant disponible!

Pour faire leurs semis, elles utilisaient habituellement des contenants recyclés ou fabriquaient des pots en papier journal, par exemple. Et beaucoup de semences étaient plantées directement en pleine terre dans le cas des légumes de culture plus rapide ou moins sensibles au froid.

Légumes et fleurs

grainothèque
Plus de 400 sachets de semences à la jardinothèque (anciennement grainothèque) de la bibliothèque d’Ahuntsic. (Photo: archives, courtoisie Bibliothèque d’Ahuntsic)

À la campagne, l’espace permettait aussi d’avoir beaucoup de fleurs, ce qui était excellent pour attirer les pollinisateurs dans le potager. Beaucoup de ces fleurs étaient des vivaces et les semences des annuelles étaient souvent conservées pour l’année suivante.

Aux alentours de la fête de Saint-Joseph (le 19 mars), on démarrait les semis de pétunias. Elles étaient alors communément appelées… des Saint-Joseph. On pourrait dire que d’un point de vue écoresponsable, c’était le bon vieux temps!

Par contre, le régime alimentaire de nos arrière-grands-parents et grands-parents n’était pas aussi varié que le nôtre. L’arrivée d’immigrants de différents pays nous a fait connaître beaucoup de nouveaux légumes, que nous avons introduits dans notre  alimentation et parfois dans nos jardins potagers.

Par ailleurs tout le monde n’a pas l’espace pour faire ses semis, notamment avec l’éclairage additionnel requis. Et sans vouloir revenir à d’anciennes méthodes de jardinage, qui ne sont pas adaptées à la vie actuelle, certaines peuvent nous inspirer pour jardiner de façon plus écoresponsable.

Quelques façons de commencer son jardinage:

1. Utiliser des semences patrimoniales achetées en ligne de semenciers québécois, ce qui permet de récolter les semences en fin de saison pour les semis de l’année suivante (au contraire des semences hybrides). Il est facile de le faire avec les tomates et les haricots pour commencer. On peut aussi en acheter à l’occasion de fêtes des semences, dans certains magasins, s’en procurer au Centre culturel et communautaire de Cartierville (4C), à la bibliothèque d’Ahuntsic (jardinothèque) et même à l’Espace des Possibles Ahuntsic, rue Lajeunesse.

2. Utiliser du matériel disponible à la maison: contenants de plastique qui seraient allés au recyclage, plateaux divers, journaux pour faire des godets à semis (voir les modèles variés sur Internet), sacs de plastique (pour créer un effet de serre), lamelles d’un vieux store horizontal ou coupées à partir de pots de plastique pour faire des étiquettes d’identification, etc.
3. Troquer des vivaces et des semences avec voisins et amis pour ajouter des variétés à notre jardin, et cela à coût nul. Ou acheter des plants d’un fermier de famille qui offre ce service (exemple: Jeunes au travail à Laval).

4. Éviter d’acheter des plants de légumes alors que les semences de ces légumes peuvent être plantées en pleine terre, et qui, de toute façon, se transplantent difficilement (depuis quelques années on voit même en centres jardin des plants de carottes et de radis!).

5. Ajouter des légumes, fruits, et fines herbes vivaces à notre potager (exemple: topinambours, oseille, livèche, oignons égyptiens, rhubarbe, framboises, fraises, mûres, thym, sarriette, origan, ciboulette, estragon, menthe, etc.) ou qui se replantent facilement à l’automne (exemple: ail).

Sans avoir connu le grand jardin de mon arrière-grand-mère, j’imagine que les souvenirs de mon père ont suscité un intérêt chez moi: jeune mariée, j’ai convaincu mon conjoint de demander un jardinet dans un jardin communautaire de notre quartier. Et à chaque changement de quartier, nous avons repris un jardinet pour cultiver une partie de nos légumes avec, parfois, l’aide d’un des enfants.

Atelier au potager productif du 4C et jardinage organisé par le CLIC de Bordeaux-Cartierville. (Photo: Toma Iczkovits, collaboration spéciale)

Depuis des années je fais des semis de plusieurs légumes. Une de nos filles suit nos traces avec un jardinet communautaire, une autre avec un potager dans sa cour, un de nos fils a eu un potager en devanture et le plus jeune est un féru de jardinage, qui réussit des semis de piments forts (ce que je n’ai pas réussi à faire!).
La relève est assurée!



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