Pour une réforme du système d’éducation: Renée-Claude Lorimier, Benoit Dugas, Florence Lorimier-Dugas, Ghislaine Raymond, Louise Lafrance, Luis Gini, Joanne Guay, Fanny Theurillat-Cloutier et Ana Mejia du Collectif de convergence citoyenne Ahuntsic-Cartierville. (Photo: Toma Iczkovits, collaboration spéciale)

De plus en plus de voix plaident actuellement pour une réforme en profondeur du système d’éducation. Le Québec n’a en effet pas connu une telle réforme depuis la Commission Parent en 1961. 

Le ministre Drainville a, en quelque sorte, fermé la porte à cette initiative en niant, dès le début de son mandat, l’existence de l’école à trois vitesses. Le gouvernement a donc décidé de demeurer passif, mais les citoyens, eux, se mobilisent. Quatre organismes citoyens, Debout pour l’école!, Je protège mon école publique, École ensemble et le Mouvement pour une école moderne et ouverte, organisent en effet 19 forums citoyens qui se tiendront ce printemps aux quatre coins du Québec. 

Les membres du Collectif de convergence citoyenne Ahuntsic-Cartierville (CCC-AC), un groupe citoyen d’Ahuntsic, comptent bien participer à cette grande discussion autour de l’éducation. Luis Gini, membre du groupe, m’avait donné rendez-vous à l’Espace des Possibles, rue Lajeunesse. Je pensais rencontrer une ou deux personnes, mais ils étaient sept à bien vouloir m’accorder une entrevue, et ce, un jour de semaine!  

Les membres du CCC-AC estiment que le plan d’École ensemble est porteur d’avenir pour le système scolaire québécois. Il s’agit de subventionner à 100 % les écoles privées. Ces écoles, qui deviendraient des écoles conventionnées, cesseraient de sélectionner leurs élèves en fonction de leurs notes et du portefeuille de leurs parents. En revanche, les écoles privées qui souhaitent demeurer privées n’obtiendraient plus aucune subvention de l’État et elles pourraient continuer de sélectionner leurs élèves. 

«Cette mesure aurait un impact important sur la fréquentation des écoles secondaires dans Ahuntsic, me dit Luis Gini. Les écoles privées sont fortement implantées dans le quartier. Mont-Saint-Louis et Regina Assumpta attirent à eux seuls près de 4000 élèves! Dans le plan d’École ensemble, les écoles privées deviendraient des écoles de proximité desservant en priorité les élèves du quartier.»  

Moins de privé

Le plan d’École ensemble aurait donc pour effet de diminuer substantiellement la part du privé dans le système scolaire québécois, qui est le plus inégalitaire au pays, selon le Conseil supérieur de l’éducation. 

«Nous trouvons désolant de devoir choisir entre nos convictions personnelles et l’avenir de nos enfants. Plusieurs parents sont d’ardents partisans du système public, mais ils inscrivent leurs enfants au privé. Le système public standard n’a plus la cote; il a été délaissé par le système public à projet particulier et l’école privée. Dans ces deux derniers cas, les élèves sont sélectionnés selon leurs notes et selon le portefeuille de leurs parents», observe Fanny Theurillat-Cloutier. 

«Seulement 15 % des élèves du public régulier se rendent à l’université, s’insurge Benoit Dugas. Ce pourcentage monte à 51 % pour le public à projet particulier et à 60 % pour les élèves issus de l’école privée. Et seulement 37 % des élèves du secondaire public accèdent au cégep! Notre système scolaire n’assure plus l’égalité des chances.» 

Benoit poursuit en me disant que leur groupe souhaite aussi parler des cégeps dans les forums de Parlons éducation. 

«Il s’est créé deux vitesses au cégep: les collèges anglophones accueillent actuellement les meilleurs étudiants, ceux qui ont les plus fortes notes au secondaire, reprend M. Dugas. Le cégep reproduit les inégalités du secondaire: c’est au cégep anglais que s’inscrivent massivement les élèves issus des écoles privées et des écoles à projets particuliers. Les autres se retrouvent au cégep français.»

L’application de la loi 101 au cégep viendrait mettre fin au cégep à deux vitesses en plus de renforcer le français, qui en a bien besoin, particulièrement à Montréal. «Nous voulons aussi que le plan d’École ensemble soit appliqué au cégep: le nombre de cégeps privés diminuerait donc substantiellement et les collèges deviendraient des cégeps de quartier, comme les écoles primaires et secondaires», explique Benoit Dugas.

Les membres du CCC-AC sont bien organisés: ils ont écrit un manifeste et créé une page Facebook, et ils se rencontrent plusieurs fois par mois. Si les citoyens aux quatre coins du Québec se mobilisent avec la même ardeur que ce groupe citoyen d’Ahuntsic, le gouvernement pourrait faire face à un véritable mouvement social. 

Les crises en éducation sont à prendre au sérieux: le gouvernement Charest a été emporté par la grève étudiante de 2012, tandis que le gouvernement Couillard avait perdu plusieurs plumes quand des milliers de parents avaient organisé des chaînes humaines autour des écoles, pour protester contre ses coupes sauvages en éducation. 

La CAQ devrait agir si elle veut éviter le même sort.   

Ce texte de la chronique Dans la tête du prof a été publié dans la version imprimée du Journal des voisins, le Mag papier d’avril-mai 2023, à la page 11.


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