Le Journal des voisins a reçu plusieurs courriels de citoyens d’Ahuntsic-Cartierville se plaignant d’une augmentation du bruit des avions dans leur quartier. Nous avons voulu en savoir plus. Des travaux sur une piste de l’aéroport Montréal-Trudeau seraient à l’origine de ce changement qui devrait durer jusqu’au 15 novembre.
«Est-ce que je suis la seule à trouver qu’il y a un nombre impressionnant d’avions qui passent au-dessus d’Ahuntsic! Aujourd’hui, dimanche, ça a commencé à 6 h 25. J’ai été réveillée par les avions», relève Diane Turcotte, sur Facebook. Sa publication a suscité plus de 100 commentaires.
«Par exemple, aujourd’hui dimanche, j’ai entendu les deux premiers avions vers 5 h 12 puis, vers 6 h 15, ça a commencé pour de bon!», écrit pour sa part Anne Rémillard au Journal des voisins (JDV). Cette résidente du Sault-au-Récollet depuis plus de 18 ans songe carrément à déménager.
Chantier
Les travaux à Montréal-Trudeau concernent notamment le drainage et l’agrandissement de la baie d’attente de l’aéroport. Aéroports de Montréal (ADM) dit que ces modifications entraînent une augmentation des décollages de la piste nord, ce qui affecte particulièrement des quartiers comme Dorval, Saint-Laurent et Ahuntsic-Cartierville.
«La fin des travaux est toujours prévue le 15 novembre. Pendant ces travaux, la piste Sud est opérationnelle, mais sa longueur est temporairement réduite, ce qui modifie l’utilisation habituelle des pistes et génère notamment une augmentation des décollages de la piste nord lors de vents du nord-est», explique un porte-parole d’ADM dans un échange de courriels avec le JDV.
ADM assure avoir informé les citoyens concernés via quatre infolettres envoyées en mars, mai et septembre 2024.
Toutefois, certains résidents trouvent ces explications insuffisantes et soupçonnent une augmentation du trafic aérien. Selon les statistiques d’ADM, 52 536 mouvements d’aéronefs ont été enregistrés entre avril et juin 2024, soit une hausse de 4,5 % par rapport à l’année précédente.
Trop de bruit
Bill Mavridis, un habitant de Bordeaux-Cartierville et fondateur de l’OBNL Montréal-dB, qui exploite l’application AÉROplainte permettant de signaler le bruit des avions, a enregistré le 28 septembre 221 décollages depuis l’aéroport de Montréal, dont 138 dépassaient 65 dB.
Il utilise un microphone et un dispositif de capture du bruit pour faire son inventaire. Il note que certains vols atteignent des niveaux sonores préoccupants. Il relève notamment un vol de Zurich à Montréal ayant généré 82 dB.
«Pour confirmer que ma capture du bruit est correcte, j’ai vérifié sur le service WebTrak de YUL [service offert par ADM pour suivre les vols en temps réel] et le niveau sonore était de 81 dB. Il semble qu’il y ait de plus en plus d’avions anciens qui survolent notre ciel et qui sont plus bruyants», croit M. Mavridis.
Ouvert en 1975, l’aéroport de Mirabel devait devenir la porte d’entrée du Canada. Victime, tour à tour, de la crise pétrolière dans les années 1970, de la concurrence de l’aéroport Pearson à Toronto et du manque d’infrastructures de transport, notamment un train pour le relier à Montréal, l’aéroport n’a jamais atteint l’achalandage attendu.
Il a été fermé en 1997. Tous ses vols commerciaux ont été transférés à Dorval, à l’aéroport Montréal-Trudeau. En 2014, le stationnement et le terminal ont été démantelés.
Doté au départ d’une seule aérogare et de deux pistes, Mirabel devait bénéficier de six aérogares et six pistes en 2000. Situé en plein champ, loin des développements urbains de Montréal, il devait pouvoir fonctionner 24 h sur 24.
Aujourd’hui, Mirabel reçoit toujours des avions-cargos, des vols privés et de vols nolisés.
Selon lui, le problème du bruit des avions persistera tant que l’aéroport restera à son emplacement actuel. Il milite pour une modification des procédures de décollage afin de réduire les nuisances sonores de 90 %. Il propose notamment que les avions tournent au-dessus de Rivière-des-Prairies et Montréal-Est à 6 000 pieds d’altitude plutôt qu’au-dessus d’Ahuntsic-Cartierville, notamment, à 3 000 pieds. Il ne cesse d’interpeller à ce sujet la députée fédérale Mélanie Joly.
Pierre Lachapelle, président du regroupement Les pollués de Montréal-Trudeau, relève que le bruit des avions n’est pas une question conjoncturelle.
«Le développement continu de l’aéroport Montréal-Trudeau est une grave erreur et il faut arrêter la construction de la nouvelle aérogare», martèle-t-il.
Cohabitation risquée entre avions et logements
Alors qu’il présentait un mémoire lors de la réunion organisée le 26 septembre par l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM) sur le nouveau Plan d’urbanisme de Montréal, Martin Massé, vice-président affaires publiques d’ADM, a indiqué qu’il serait plus avisé pour la Ville de construire de nouveaux logements en dehors des couloirs aériens.
«On comprend l’enjeu résidentiel que nous vivons à Montréal et les sites identifiés sont soit des terrains vacants, soit des terrains en [réaménagement]. Certains de ceux-là sont sous le corridor aérien. On n’est pas contre la conversion en logements, on pense que ce n’est pas avisé», a précisé M. Massé au micro de Radio-Canada.
Il souhaite que les promoteurs assurent une insonorisation des habitations et éventuellement informent formellement les nouveaux occupants du trafic aérien.
Selon ce média, ADM aurait adressé en juillet une lettre à la Ville et à l’arrondissement Ahuntsic-Cartierville pour leur demander de construire l’Écoquartier Louvain ailleurs.
Le cabinet de la mairesse Valérie Plante a réagi en qualifiant de surprenants les propos de M. Massé.
«Montréal traverse présentement une crise du logement et une crise de la pauvreté. La création de logements n’est pas un caprice, c’est une nécessité pour offrir un toit à tout le monde et la grande majorité de nos partenaires sont solidaires de nos démarches», a rapporté La Presse, citant un attaché de presse de la mairesse.
«Non seulement ADM décide si nous allons dormir ou pas la nuit. Mais ADM va même édicter le plan d’urbanisme de la Ville», s’est insurgé pour sa part Pierre Lachapelle, président des Pollués de Montréal-Trudeau, interrogé par le JDV.
ADM investira 4 milliards de dollars d’ici 2028 pour ajouter du stationnement, un nouveau débarcadère, aménager des accès routiers, se connecter au REM et construire ce qui a été appelé une «jetée satellite». Elle permettra de nouvelles portes d’embarquement.
«Ce sont dix portes de plus et cela signifiera plus d’avions dans le ciel de Montréal», assure M. Lachapelle.
L’aéroport Montréal-Trudeau a accueilli 21 millions de passagers en 2023, soit 32,3 % de plus qu’en 2022.
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La sortie de Martin Massé est tout à fait inappropriée et montre le mépris d’ADM pour le bien être des citoyens en général et surtout les résidents d’Ahuntsic Cartierville. Si on avait un peu de perspective pour l’avenir on transfèrerait à Mirabel les vols internationaux et on pourrait conserver les vols domestiques à Dorval, ce qui était somme toute l’objectif de la construction de l’aérogare de Mirabel.Comme on avait oublié à l’époque d’y greffer un service de transport rapide entre Montréal et Mirabel, on a fermé Mirabel au lieu d’y ajouter ce service essentiel pour tout aéroport moindrement important. Le fédéral nous a habitué à de tels gâchis, qu’on pense à Trans Mountain ou au merveilleux système de paie des fonctionnaires. Bref, ADM et le fédéral font bien souvent preuve d’amateurisme dans la gestion d’infrastructures importantes.
Bonjour.
Votre article repond a ma perception. De plus, il arrive régulièrement que je doive demander a mon interlocuteur d’attendre que l’avion passe pour continuer notre conversation au ParcTolhurst car meme a seulement quelques metres on n’entend plus l’autre, temporairement. Plus nombreux, plus basse altitude, plus bruyants …
Merci de vos articles touchant la realite du quartier
Julie Deschamps
Je demeure non loin de la promenade Fleury et j’ai remarqué depuis quelques semaines qu’il y a plus d’avions au-dessus d’Ahuntsic et qui volent plus bas, donc très bruyants. Je pensais que je me faisais des idées mais çà me confirme que je ne suis pas la seule à constater cela.