Le 3 mai, c’est la Journée mondiale de la liberté de la presse. Avant de passer au prochain article parce que le sujet a l’air vraiment platte, sachez que votre qualité de vie personnelle dépend justement d’une presse libre. Je m’explique.

Quand on discute du sort du monde, on se fait souvent dire qu’on a beau protester, même voter, on n’a aucun pouvoir, aucune influence sur le cours des choses. Que les journalistes ne sont que des brasseurs de merde. Et qu’on trouve toute l’information dont on a besoin sur Facebook, Instagram, YouTube et Pinterest.

C’est là que je me dis que les gens qui pensent comme ça sont réellement naïfs et insouciants. J’irais même jusqu’à dire : ignorants. D’une ignorance crasse.

Avant de me traiter de moralisateur, laissez-moi faire mon travail de journaliste, c’est-à-dire expliquer, révéler, départager le vrai du faux, montrer ce qui n’est pas montrable, étaler au grand jour ce qu’on veut taire à tout prix.

Car le monde est rempli de gens méchants et égoïstes. Et qu’ils sont nombreux, ces gens méchants et égoïstes, à alimenter des comptes Facebook, Instagram, YouTube et Pinterest pour faire avancer leur cause… qui se confond souvent avec leur portefeuille.

Surtout, dans la vraie vie, entre deux trajets à la garderie, un Big Mac et trois sessions sur Fortnite, ce que les gens ne saisissent pas, c’est l’incroyable pouvoir d’influence qu’ils ont sur la société. Oui, chacun de nous, on a un pouvoir immense. Et ce pouvoir, il s’exerce chaque minute, chaque heure, chaque jour, à l’année, depuis des siècles. Ce pouvoir, il s’appelle : l’opinion publique.

Grâce à l’opinion publique, on a le vote des femmes, le droit à l’avortement libre et gratuit, le salaire minimum, de l’eau propre, l’assurance-maladie, l’avancement de la science, le respect des minorités, l’achat local, des produits sains dans notre assiette, la possibilité d’étudier, de travailler, de voyager, de se déplacer, de se divertir, de magasiner où et quand on veut; bref tous les avantages qu’on retrouve dans les pays libres, démocratiques et riches.

Et qui l’alimente, cette fameuse opinion publique? Ben oui! Les journalistes! Qui travaillent où? Dans une presse libre.

On dit souvent que les journalistes et les médias d’information sont le quatrième pouvoir ou les chiens de garde de la démocratie. À l’ère des fake news, des salles de rédaction qui se vident, des journaux qui ferment leurs portes, des manifs des conspirationnistes, des radios poubelles et des comptes Facebook qui accusent les médias de mentir à la population, on se demande bien quel genre de pouvoir il reste aux journalistes.

Beaucoup.

Car le journaliste a un avantage sur les fabricants de fake news typiques de Facebook, Instagram, YouTube et Pinterest : son éthique. Il n’a pas le droit de mentir. C’est dans son code. Et il cherche la vérité de façon presque maladive. Tellement, qu’on le déteste plus souvent qu’à son tour. Un célèbre journaliste, Albert Londres, a d’ailleurs déjà déclaré que le travail des journalistes n’était pas de se faire des amis, mais de « tremper la plume dans la plaie »!

Et cette recherche de vérité, ça enrichit tout le monde, politiquement, matériellement, philosophiquement.

Mais pas partout. Surtout pas là où la presse n’est pas libre. Généralement, on parle de dictatures ou de contrées plus ou moins démocratiques. Prenez une carte du monde des plus avantagés selon l’Indice de développement humain de l’ONU et juxtaposez-là avec celles qui affiche le PIB par habitant, le niveau de corruption, de liberté individuelle, de liberté des journalistes, ou toute autre carte du genre.

Outre exception, vous verrez que les pays où la qualité de vie est la meilleure sur cette planète, ce sont ceux où les journalistes sont les plus libres : le Canada, les pays scandinaves, l’Australie, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, la Suisse, l’Islande, la Belgique, les Pays-Bas, l’Espagne, le Japon, la Nouvelle-Zélande, la Corée du Sud… (À ce palmarès, les États-Unis sont dans une classe à part.)

Et dans les pays où ça va le plus mal, les journalistes y sont tués, les médias censurés, contrôlés par le gouvernement ou ont carrément disparu. Les pires des pires : Yémen, Érythrée, Égypte, Arabie Saoudite, Iran, Syrie, Corée du Nord, Myanmar…

Certains pays semi-libres sont marqués par des génocides, des morts de la covid par millions, des guerres, des inégalités épouvantables, de la corruption systématisée, l’effondrement de l’économie ou plusieurs de ces tares : Chine, Brésil, Russie, Turquie, Cuba, Vietnam, Turkménistan, Afghanistan, Bahreïn, Azerbaijan, Djibouti, Venezuela, Zimbabwe…

Prenez la carte de Reporters sans frontières, qui accompagne cet article : où fait-il bon vivre? Dans les pays en jaune pâle et foncé. Les pires endroits sont en noir.

Que doit-on en déduire? Que la liberté de presse, c’est la meilleure garantie d’une bonne qualité de vie. Et que l’information est un bien public, précieux, qu’il faut chérir et garantir par les lois et… l’opinion publique.

En terminant, les gens d’Ahuntsic-Cartierville sont chanceux. Ils habitent en zone jaune sur la carte. Et ils sont parmi les rares Québécois à avoir deux journaux de quartier. Les élites, élus et décideurs de tout acabit n’ont qu’à bien se tenir!



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