Parents, on vous demande de montrer l’affiche rouge et blanche à vos enfants!
Alors que le début des années 2000 et, auparavant, l’arrivée des mères sur le marché du travail ont nui aux efforts de recrutement du populaire organisme Parents-Secours, fondé dans les années 1970, voilà que le dynamisme d’une mère bénévole aura permis aux affiches-fenêtres rouges et blanches de se multiplier dans Ahuntsic. Le hic? Les tout-petits ignorent pour la plupart ce que ces affiches signifient.
En 2012, un article publié sur le site du Journal des voisins relate les déboires de Parents-Secours dans Ahuntsic-Cartierville. L’organisme tente, avec difficultés, de reconquérir ses lettres de noblesse, notamment de recruter des parents pour joindre ses rangs.
Entre 2014 et 2020, le nombre de foyers prêts à s’engager recule de manière radicale partout au Québec. En 2018-2019, d’autres Ahuntsicois bénévoles tentent l’aventure, mais leur comité responsable perdant des membres, il doit être dissous. Une fois de plus, le programme tombe à l’eau. Pour que Parents-Secours puisse s’afficher dans un quartier, le comité responsable doit compter au moins trois parents.
En 2018, plus largement au Québec, La Presse écrit: «Sur papier, la dégringolade est nette: le nombre de foyers-refuges associés à Parents-Secours est passé de plus de 100 000 à la fin des années 1980 à 4 224 [en 2017]. Ces 10 dernières années, l’organisme a encore perdu presque 40 % de ses portes où enfants et aînés en difficulté peuvent trouver secours et réconfort.»
2020, année charnière
En 2020, Évelyne Audet, jeune maman, décide de mettre de nouveau sur pied un tel comité dans Ahuntsic. «Je me promenais dans un autre quartier de Montréal et j’ai vu une affiche-fenêtre rouge et blanche, et ça m’a rappelé des souvenirs d’enfance. J’habitais à Québec, et je me souviens que notre voisin avait une affiche semblable dans sa fenêtre. Je n’en ai pas eu besoin, mais je me suis souvenu également du sentiment de sécurité qui m’habitait juste parce que je voyais cette affiche-là, et ça m’a donné le goût de faire pareil ici», ajoute-t-elle.
Évelyne Audet met donc sur pied un comité de familles bénévoles responsables du programme dans Ahuntsic. Toujours dans le quartier, 75 familles ont été recrutées depuis pour être familles refuges. Cartierville constitue un territoire indépendant pour Parents-Secours; cela nécessiterait la mise sur pied d’un autre comité. Comme il n’y en a pas pour le moment, le programme et les affiches-fenêtres sont absents de son paysage. Avis aux intéressés!
Faire connaître aux enfants
La grande majorité des enfants d’âge scolaire et des tout-petits, ainsi que de nombreux parents, ignorent ce qu’est Parents-Secours, ou croient que le programme qu’ils ont connu, enfants, n’existe plus.
Évelyne Audet a confié récemment une mission aux familles ahuntsicoises, sur une page Facebook du quartier: « Salut les parents! […] Il y a donc 75 maisons qui portent fièrement l’affiche-fenêtre. Le hic, c’est que les enfants d’aujourd’hui n’ont aucune idée de ce que c’est! Alors voici ma mission pour vous aujourd’hui : Ce soir, prenez 2 minutes pour montrer ce logo à votre enfant, et apprenez-lui à quoi ça sert. Ça pourrait lui être utile un jour! Et si jamais vous voulez vous-même être un foyer refuge: parentssecoursahuntsic@gmail.com.»
Un peu d’histoire
Faisons un retour en arrière. L’organisme Parents-Secours a été implanté au Québec dans les années 1970 afin d’assurer la sécurité des enfants et, depuis 1992, celle des aînés. Quand elles sont à la maison, les familles participantes mettent une affiche à leur fenêtre, un dessin stylisé rouge et blanc d’un tout-petit donnant la main à un adulte.
Les enfants avertis savent que s’ils sont perdus, s’ils sont suivis, s’ils ont peur de quelque chose ou de quelqu’un et qu’ils trouvent cette affiche sur leur chemin, ils peuvent sans crainte sonner à la porte pour demander de l’aide aux adultes qui s’y trouvent.
L’organisme sans but lucratif est né à la suite de la disparition, en 1976, d’un jeune garçon. Des citoyens décidèrent de se regrouper afin de prévenir les événements dramatiques de ce genre. Après avoir examiné différentes options, les fondateurs ont décidé d’adhérer à l’initiative d’un groupe d’Ontariennes qui avait mis sur pied un groupe semblable en 1968. Parents-Secours est lancé d’abord à Sainte-Thérèse, à Laval, à Pincourt puis à Pierrefonds.
En 1977, Parents-Secours comptait 33 groupes répartis dans la région de Montréal. La même année, un comité provincial a été mis sur pied afin de coordonner l’avenir du programme.
Depuis, Parents-Secours a même fait des petits à l’étranger, notamment à Liège en Belgique. Parents-Secours de Liège tenait même une semaine spéciale en octobre dernier pour faire connaître le programme aux enfants et recruter des familles refuges.
Un renouveau, après une baisse
Patricia Tardif de Parents-Secours du Québec rapporte qu’en 2022, une dizaine de comités bénévoles se sont ajoutés au Québec, pour un total de 76 comités regroupant 2 337 foyers-refuges.
Également, en 2022, Mme Tardif signale que 22 000 enfants ont fait connaissance avec le programme grâce à diverses rencontres, de même que 6 250 aînés. Parents-Secours, en effet, se porte au secours d’enfants en situation vulnérable, mais également de personnes âgées.
Sait-on combien d’enfants et d’aînés ont pu être «secourus» grâce aux affiches des foyers-refuges partout au Québec au cours de la dernière année? Dans son dernier rapport annuel, l’organisme a établi que 98 enfants ont été aidés en 2022: 86 s’étaient perdus, 5 ont été blessés, 1 avait été laissé seul, 1 avait oublié ses clés, 2 ont craint quelque chose ou quelqu’un et 3 autres pour d’autres raisons.
Outre les enfants, dont les âges varient de 0 à 17 ans (la catégorie la plus concernée est celle des 6 à 11 ans), 24 aînés ont trouvé de l’aide dans les foyers-refuges.
Toujours présent
Au Québec, dans les décennies qui ont suivi les années 1980, l’entrée des mères sur le marché du travail et le manque de subventions ont contribué à faire presque tomber l’organisme dans l’oubli.
Après son renouveau des dernières années, le manque de bénévoles et de familles refuges se fait toujours sentir.
De nombreux parents croient, à tort, qu’ils doivent toujours afficher la petite pancarte à leur fenêtre et, comme ils ne sont pas toujours à la maison, ils ne s’engagent pas à devenir foyers-refuges. L’affiche-fenêtre doit être installée quand un parent est sur place; autrement, il l’enlève; rien de bien compliqué.
Patricia Tardif souligne qu’il existe également des aide-mémoires à accrocher près de la porte d’entrée des logis pour faire penser aux parents d’enlever leur affiche quand ils doivent s’absenter. «Toutefois, nous n’avons jamais eu de plaintes disant qu’un enfant s’était heurté à une porte close avec une affiche à la fenêtre», ajoute-t-elle.
Effet COVID
Il semble que depuis 2020, le recrutement a permis à l’organisme de faire peau neuve, à tout le moins dans Ahuntsic, mais pas pendant les confinements, précise Évelyne Audet. «Durant ces périodes, les familles qu’on devait visiter chez elles préféraient remettre la rencontre.» C’est donc un peu avant la pandémie et depuis le retour aux activités à la normale que le recrutement s’est accentué dans Ahuntsic. Le nombre de comités responsables a, quant à lui, augmenté au Québec. La pandémie semble avoir fait réfléchir.
Pour devenir foyer refuge, il faut montrer patte blanche: le comité bénévole du territoire doit visiter le logis et vérifier les antécédents judiciaires des adultes qui y habitent.
Parents-Secours a toutefois fait des gains en raison du télétravail. Plusieurs jeunes familles y ont vu l’occasion de faire du bénévolat tout en restant chez soi.
Joignez-vous au comité responsable!
Pour 2023, les priorités d’Évelyne Audet pour Parents-Secours dans Ahuntsic sont d’abord de faire connaître le programme aux enfants, ensuite de convaincre d’autres bénévoles de joindre les rangs du comité responsable et, finalement, de recruter encore plus de foyers-refuges.
«J’aimerais bien qu’on se rende à 100 foyers-refuges, dit Mme Audet. Plus on serait de membres dans le comité, mieux ce serait. Mais avant tout, les enfants doivent apprendre à reconnaître l’affiche-fenêtre rouge et blanche.»
L’Ahuntsicoise considère que son métier d’animatrice télé et de journaliste, avec des horaires changeants, lui permet d’accomplir le travail de responsable du comité quand elle est disponible. En revanche, le travail de responsable est exigeant pour la jeune maman de deux enfants, dont un bébé de quelques mois.
Les écoles, difficiles d’accès
Évelyne Audet déplore que malgré ses efforts pour aller rencontrer les enfants dans les écoles et faire connaître le programme de Parents-Secours, un seul établissement scolaire dans Ahuntsic, l’école Christ-Roi, leur ait ouvert ses portes. Avec des membres du comité dont elle est responsable, elle a pu présenter Parents-Secours aux écoliers dans leur classe et leur montrer l’affiche-fenêtre emblématique blanche et rouge de l’enfant qui tient la main d’un adulte.
Patricia Tardif confirme qu’il est parfois difficile de faire une percée auprès des écoles et que cela représente encore un important défi. Francine Chartrand, pour sa part, a pu organiser des activités dans les écoles et les camps de jour, au cours des derniers mois, ce qui est de bon augure pour l’avenir.
Cet article est paru dans la chronique urbaine de quartier du Mag papier, la version imprimée du Journal des voisins, édition avril-mai 2023, à la page 6.
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