Ahuntsic-Cartierville peut s’enorgueillir d’avoir un village historique, situé complètement à l’est de l’arrondissement, village qui n’a pas fini de livrer ses trésors et de faire parler de lui… On devrait entendre beaucoup parler du «Sault» dans l’avenir. Des consultations publiques seront menées par la Ville de Montréal [l’arrondissement a déjà commencé, pour sa part] pour la mise en valeur de Fort Lorette alors que, parallèlement, la Société d’histoire Ahuntsic-Cartierville (SHAC) est le porteur de ballon pour obtenir une institution muséale.
Sans compter que d’aucuns dans le nord de la ville voudraient que le Sault-au-Récollet soit un jour un véritable pôle d’attraction sur le plan touristique. Nul doute que ce lieu pourrait attirer bon nombre de touristes, même de l’extérieur du pays, compte tenu de son histoire et des richesses qu’il compte. Il est enfin question de reconnaître le «Sault» comme lieu historique national du Canada.
Ce secteur montréalais a une dénomination officielle : le site patrimonial de l’Ancien-Village-du-Sault-au-Récollet. On vient justement de souligner le 27e anniversaire de sa désignation par la Ville de Montréal.
L’emplacement, s’étalant sur 3000 mètres le long de la rivière, compte des éléments archéologiques et architecturaux qui témoignent de l’évolution du village depuis le 17e siècle. Et qui comprend aussi son lot de résidences ou institutions modernes.
Concrètement, le noyau du village est situé entre ce qui est aujourd’hui le boulevard Gouin et la rivière, et entre l’avenue Saint-Charles (ou la limite ouest du secteur englobant l’école secondaire Sophie-Barat) et la limite de Montréal-Nord, complètement à l’est de l’arrondissement.
On remonte au temps des premiers arrivants, autochtones d’abord, puis des explorateurs français
Dans la liste de bâtiments historiques construits au 18e et 19e siècle, il ne faut certes pas oublier l’église de la Visitation, la seule dans l’île datant du régime français, et qui a été revampée récemment.
Mais que signifie exactement cette dénomination qui date du 6 avril 1992?
Patriomoine-Variation sur un thème
Yvon Gagnon, coprésident de la Société d’histoire Ahuntsic-Cartierville (SHAC), avertit d’entrée de jeu qu’il n’est pas évident de démêler ce qui est classé ou désigné, d’autant plus que l’on peut parler de territoire, d’ensemble, de bâtiments, d’objets ou de documents.
« Les citations au niveau de la ville sont vastes et complexes, signale M. Gagnon. Le point de départ peut venir d’organismes sans but lucratif (OSBL) ou d’une société d’histoire. On peut parler d’un bâtiment comme Sophie-Barat ou de l’intérieur d’une chapelle. Mais cette démarche est tout de même plus simple que celle que l’on retrouve à l’étape supérieure, celle du classement. Dans ce cas, ça prend un dossier plus étoffé avec un intérêt national. Les enjeux ne sont pas les mêmes pour les propriétaires », a-t-il ajouté.
Feu la Société de conservation du Sault-au-Récollet a joué un rôle important dans le processus de désignation officielle. Fondée en février 1976 par Paul Carle et Jean Bélisle, l’organisme a fait pression auprès de la Ville pour rouvrir la Maison du Pressoir et le site des moulins, devenus des bâtiments historiques.
C’est moins le cas aujourd’hui mais le «Sault» (signifiant rapides) était aussi le nom d’un immense territoire dans l’île.
« Au début des paroisses au 19e siècle, de poursuivre M. Gagnon, le Sault-au-Récollet représentait un huitième du territoire de l’île de Montréal (avec aujourd’hui des lieux comme St-Léonard et St-Laurent). »
Au niveau du patrimoine immobilier, l’Église de la Visitation a toute une renommée. Mais il faut ajouter des territoires comme Fort-Lorette. Des découvertes archéologiques récentes ont amené, cette fois, le gouvernement québécois à intervenir.
Quelques mois avant l’élection de la CAQ, la ministre de la Culture et des Communications, Marie Montpetit (actuelle députée de Maurice-Richard) classait aux fins de protection le site de l’ancien fort de la mission (centre d’évangélisation) de la Nouvelle-Lorette, au Sault-au-Récollet. On y trouvait à l’origine plusieurs bâtiments, dont une maison seigneuriale, une école, une église, la maison des fermiers, une écurie, sans compter un village amérindien. Environ 200 personnes y étaient établies.
Riche patrimoine
« Ce n’est pas parce que c’est vieux que c’est patrimonial, et ce n’est parce que c’est récent qu’on ne peut pas être patrimoine avec un ‘’s’’ », a déclaré M. Gagnon.
«Aussi même dans le cadre bâti, il y a des entités patrimoniales, sans oublier le patrimoine environnemental comme les berges de la Rivière-des-Prairies ou le patrimoine culturel et même le patrimoine matériel, le patrimoine religieux, le patrimoine industriel, le grand mal aimé. On a un bâtiment témoin ici, la Maison du meunier, avec l’énergie hydraulique utilisée jusqu’en 1960. Ce fut une longue période. Aussi, le patrimoine amérindien relié au site riverain, datant de milliers d’années. N’oublions pas que Fort-lorette est le deuxième site vérifiée et attesté après Lachine » a ajouté Yvon Gagnon.
Respect des lieux
C’est en vertu de la loi québécoise sur le patrimoine culturel que les villes peuvent citer, via un règlement de son conseil de ville, un bien patrimonial dont un site.
« La citation constitue le plus haut niveau de reconnaissance qu’une municipalité peut accorder à un bien ou une partie de son territoire présentant un intérêt patrimonial pan-montréalais », a indiqué Camille Bégin, relationniste, au service de l’expérience citoyenne et des communications de la ville.
Le processus de citation implique une série de démarches; documentation du lieu, évaluation patrimoniale, et préparation d’un projet de règlement de citation qui identifie entre autres le territoire visé et qui est présenté au conseil de ville pour avis de motion.
On notera aussi la tenue d’une séance publique du Conseil du patrimoine de Montréal et finalement l’adoption par le conseil de ville du règlement de citation.
Impact pour les résidants
Les interventions faites dans un site patrimonial cité sont encadrées par trois différentes entités : la Loi sur le patrimoine culturel, le règlement adopté par la ville pour ce lieu et le règlement d’urbanisme de l’arrondissement.
Ainsi, tout citoyen ne peut pas faire ce qu’il veut chez-lui en raison de la Loi sur le patrimoine culturel.
On doit ainsi se conformer aux conditions liées à la conservation des valeurs patrimoniales d’un site patrimonial cité, qui s’ajoutent à la réglementation municipale.
Il faudra notamment être prudent quand on veut faire une nouvelle construction ou modifier l’extérieur d’un immeuble. Même l’intérieur d’un bâtiment pourrait être touché par des normes précises à respecter.
Il faut aussi l’autorisation en haut lieu dans un cas de démolition en tout ou partie d’un immeuble situé dans un site patrimonial cité.
« À Montréal, a indiqué Mme Bégin, la décision d’autoriser une intervention relève du conseil d’arrondissement (en raison d’une délégation de pouvoir), sauf s’il s’agit une démolition de 40% ou plus du volume d’un bâtiment. La décision relève alors du conseil de ville. Avant d’autoriser une intervention, le conseil d’arrondissement ou de ville prend l’avis du conseil local du patrimoine, soit le comité consultatif d’urbanisme ou le Conseil du patrimoine de Montréal, selon le type d’intervention » a-t-elle précisé.
Dans le cas de l’ancien village du Sault-au-Récollet, l’encadrement des interventions est fait par l’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville par son règlement d’urbanisme.
Chose intéressante, les propriétaires d’immeubles dans un site patrimonial peuvent bénéficier d’une aide financière pour la restauration de leur propriété.
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