Vue de la prison de Bordeaux l’automne (Photo : JDV – Philippe Rachiele)

Une nouvelle éclosion majeure s’est déclarée depuis une semaine à la prison de Bordeaux. Alors qu’on ne comptait aucun cas dans l’établissement de détention il y a une semaine à peine, près d’une centaine de cas y ont été confirmés après une opération de dépistage massif en début de semaine.

Au total, 86 personnes incarcérées et au moins un membre du personnel sont actuellement infectés, selon les données publiées par le ministère de la Sécurité publique (MSP) en date du 14 décembre.

Le nombre de cas confirmés explose en une semaine

Le premier cas détecté la semaine dernière a été « une trouvaille fortuite », explique le docteur David Kaiser, médecin spécialiste en Santé publique et médecine préventive à la Direction régionale de santé publique (DRSP) de Montréal.

« Ce qu’on voit en ce moment à Bordeaux, c’est quelque chose de semblable à ce qu’on a vu à quelques reprises depuis le début de l’automne [dans les établissements carcéraux], c’est-à-dire qu’on découvre un premier cas, souvent des gens asymptomatiques, et quand on fait du dépistage de masse, on découvre plusieurs autres cas », indique le docteur Kaiser.

C’est ainsi que le nombre de cas confirmés est passé d’une quarantaine mardi à près de 90 mercredi, ce qui fait à nouveau de l’établissement de détention l’une des plus importantes éclosions actives à Montréal.

En octobre, la prison de Rivière-des-Prairies (RDP) avait aussi connu une importante éclosion, qui s’était même propagée jusqu’à la prison de Sherbrooke en raison du transfert d’un détenu asymptomatique entre les deux établissements, selon des informations rapportées par le Journal de Montréal.

Transferts interrompus, retour à l’isolement en cellule

Le JDV a cherché à savoir si l’éclosion en cours à Bordeaux pouvait être liée à des transferts de personnes incarcérées depuis la prison de RDP, où une nouvelle éclosion s’est déclarée le mois dernier.

La DRSP n’était pas en mesure de confirmer mercredi si l’origine de l’éclosion pouvait être retracée à un transfert entre les établissements.

« On est vraiment dans beaucoup de transmission asymptomatique, silencieuse », fait valoir le docteur Kaiser

Dans ce contexte, il est pratiquement impossible de savoir comment le virus est entré et s’est propagé dans l’établissement carcéral, car les chaines de transmission asymptomatique sont beaucoup plus difficiles à suivre.

« Il n’y a pas eu de transfert dans les deux dernières semaines », assure toutefois une porte-parole du MSP.

Suivant les recommandations de la santé publique, les autorités carcérales ont mis en place diverses mesures de contrôle afin de contenir l’éclosion, dont l’interruption des transferts vers d’autres établissements de détention, indique une porte-parole du MSP.

Des mesures additionnelles prévoient aussi l’isolement en cellule et les repas en cellule des personnes incarcérées ainsi que la suspension des programmes et activités dans la prison.

« Bien sûr, il y a des gens qui sont en isolement, quand c’est des cas où des contacts directs de cas. Ce qu’on travaille vraiment [c’est] de limiter la durée et puis, bien sûr, ce qu’on a bien appris des vagues précédentes, c’est de s’assurer que les mesures de base, c’est-à-dire les droits fondamentaux des gens, sont respectées même pendant leur isolement et je pense que là, on a quand même cheminé depuis la première vague », fait savoir le docteur Kaiser.

Le porte-parole de la santé publique semble ainsi reconnaitre implicitement que les confinements cellulaires prolongés mis en place pour contenir les précédentes éclosions pourraient avoir porté atteinte aux droits des personnes incarcérées.

[Mise à jour à 15h30 : ] Selon des informations obtenues par le JDV, plusieurs conjointes de détenus du secteur C sont sans nouvelles de leurs proches incarcérés depuis que ceux-ci ont été placés en isolement dans leur cellule 24 heures sur 24, le 9 décembre.

L’isolement prolongé en cellule a été décrié publiquement tant par les familles des personnes incarcérées que par la protectrice du citoyen, Marie Rinfret, qui a assimilé cette pratique à une forme de torture.

Couverture vaccinale encore limitée dans la population carcérale

Il précise que les mesures en place dans l’établissement peuvent maintenant être modulées, comme dans la communauté, selon le statut vaccinal.

La santé publique est toutefois incapable d’évaluer précisément le taux de couverture vaccinale dans la prison.

« C’est assez complexe parce qu’il y a beaucoup, beaucoup de roulement », fait valoir le docteur Kaiser.

Il estime que plus de la moitié de la population carcérale est vaccinée, soit une « bonne proportion », mais un taux nettement plus bas que celui de la population générale.

Face à la hausse des cas dans la communauté et à l’émergence du variant Omicron, la santé publique dit rester « très à l’affût » et surveiller de près la situation dans les établissements de détention qui sont des milieux particulièrement à risque pour la contagion.



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