Prostituée négocie avec un client
Source : Wikicommon

Des clients de prostituées pourraient éviter les poursuites judiciaires et la prison s’ils acceptent de suivre un programme de sensibilisation et d’éducation.

Dans une lettre ouverte, Christine St-Pierre, députée provinciale de l’Acadie, fustige le gouvernement dirigé par la Coalition avenir Québec (CAQ) pour avoir mis en place une disposition qui permet aux clients de prostituées de se soustraire à la justice avant toute autre mesure en faveur des victimes, les prostituées.

Le programme en question est en vigueur depuis mai à titre de projet pilote dans la ville de Longueuil sur la rive sud de Montréal. Il est dirigé et suivi par un chercheur et pourrait être déployé ailleurs au Québec à la suite de son évaluation.

Le client, admissible après le dépôt d’accusations « pour l’obtention de services sexuels moyennant rétribution auprès d’une personne majeure », aura été arrêté lors d’une opération policière.

« Il importe de préciser qu’une personne qui solliciterait des services sexuels auprès d’une personne mineure ne serait aucunement admissible », souligne le service des communications du ministère de la Justice qui confirme l’existence de cette nouvelle disposition.

Par ailleurs, un accusé déjà condamné pour une infraction à caractère sexuel ou commise dans un contexte de violence conjugale ne serait pas admissible au programme.

Pour rappel, depuis 2014, le Code criminel prévoit à son paragraphe 286 et les titres suivants que c’est le client qui sollicite des services sexuels payants qui commet un acte criminel. Cette accusation prévoit une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans de prison, et une amende pouvant atteindre 1000 $ ainsi qu’une inscription de ces sentences au casier judiciaire du contrevenant.

Dans sa lettre, Christine St-Pierre s’exprime en tant qu’ex-vice-présidente de la Commission spéciale sur l’exploitation sexuelle des mineurs. Elle observe qu’un tel programme a été mis en place avec beaucoup de discrétion. Elle s’étonne aussi de voir « prioriser la création d’un programme visant les clients-abuseurs avant de mettre en place les mesures plus urgentes destinées directement aux victimes. »

Objectifs

Pour le ministère de la Justice, une telle démarche vise la diminution de la demande de services sexuels et la réduction de risque de récidive.

Elle devrait « amorcer une compréhension et un changement de comportement des accusés à l’égard de l’achat de services sexuels », écrit le service des communications dans un courriel.

Le client qui bénéficiera de cette disposition devra aussi accepter de verser 1 500 $ au Fonds d’aide aux victimes d’actes criminels et en être à sa première participation au projet pilote. C’est une contribution financière des accusés venant en aide aux victimes d’exploitation sexuelle.

Et les victimes?

La Concertation des luttes contre l’exploitation sexuelle (CLES), un regroupement d’organismes et de membres individuels qui luttent pour un monde sans prostitution, était au courant de la mise en place du projet pilote.

« De la manière comment cela nous a été présenté, nous étions d’accord », indique Jennie-Laure Sully, organisatrice communautaire à la CLES.

C’est le fait d’entendre les victimes, les travailleuses du sexe, qui semble particulièrement important aux yeux de ce groupe.

« Les clients, lors de la journée de sensibilisation, seront confrontés aux survivantes [les prostituées]. Ils verront l’impact de leur geste. Ils devront faire face aux victimes », souligne Mme Sully.

Pour elle, ce moment où la victime peut parler est un pas de plus dans la démarche de celles qui veulent quitter ce milieu.

« On pense que les survivantes ont beaucoup à dire. Pouvoir témoigner fait partie de leur processus de sortie », croit la porte-parole de la CLES.

Autres mesures

La députée de la circonscription provinciale de l’Acadie pointe aussi le fait d’avoir ignoré les autres dispositions en faveur des victimes suggérées dans les recommandations de la Commission sur la prostitution dont elle était vice-présidente.

«[Les victimes] se sentent abandonnées et ont l’impression qu’il est plus urgent pour la CAQ d’absoudre les acheteurs de services sexuels, de préserver leur carrière et ainsi éviter un casier judiciaire plutôt que de leur venir en aide », écrit Mme St-Pierre.

Selon la représentante de la CLES, d’autres mesures sont sur la table et devraient être mises en œuvre.

« On nous a parlé de l’aide à la sortie. On nous a contactés plusieurs fois pour nous dire comment faire. C’est la mesure la plus importante », relève Mme Sully.

Les femmes qui voudraient quitter le milieu de la prostitution se retrouvent sans aucun moyen financier, du jour au lendemain. C’est alors l’itinérance qui les guette.

Pour Mme Sully, cette disposition, si elle était mise en place, reposera en d’autres termes la question du choix que certains font prévaloir quand on parle des travailleuses et travailleurs du sexe.

« Personne ne devrait se retrouver dans une situation où il n’a pas le choix. On ne peut pas parler de choix quand quitter la prostitution n’est pas sans conséquences. »



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Bendada Youcef
Bendada Youcef
2 Années

Oh!!! Sacré Amine. Éclectique..

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