Un Petit Garrot mâle. (Photo : Jean Poitras)

Notre chroniqueur ornithologue présente le Petit Garrot, un oiseau migrateur qui reviendra au Québec durant le mois d’avril.

Voici un oiseau bien de chez nous, qu’on aperçoit toutefois rarement : le Petit Garrot, de son nom latin Bucephala albeola et en anglais Bufflehead.

Comme son nom l’indique, il est beaucoup plus petit que ses cousins le Garrot à œil d’or ou le Garrot d’Islande. 

Il ne mesure que 34 cm au lieu des 65 cm des deux autres. C’est le plus petit des canards plongeurs, mais il n’en est pas moins remarquable. Et l’apercevoir au hasard d’une randonnée « fait la journée ».

Description

Le Petit Garrot mâle se décline en deux couleurs : blanc pour la majeure partie de la tête, la gorge, la poitrine, le ventre et une partie des ailes, noir pour la face et le dos. Selon la lumière, les parties sombres de la tête et du dos laissent paraître une iridescence verte ou violacée. Le bec est gris.

La femelle a la tête brune, le dos gris-brun et la poitrine grise allant d’un dégradé de plus en plus foncé vers le ventre. On remarque une tache blanche sur les joues et un miroir blanc sur le bord de l’aile. Son bec est gris plus foncé que chez le mâle.

Habitat et comportement

Le Petit Garrot préfère les lacs et les étangs de faible profondeur et de faible étendue. Il évite les étendues d’eau ayant une végétation dense qui favorisent la présence des poissons prédateurs comme le brochet. Les couples se forment sur les aires d’hivernation et, bien qu’on puisse les voir en petits groupes lors des migrations printanières, les couples, une fois leur territoire de nidification choisi, le défendent contre les autres membres de l’espèce.

Ces canards se retrouvent le plus fréquemment dans des peuplements mixtes où le peuplier, l’érable et autres arbres similaires abondent.

Un couple de Petits Garrots. (Photo : Jean Poitras)

Alimentation et nidification

Le Petit Garrot se nourrit essentiellement d’insectes et de larves qu’il va chercher en plongeant en eaux peu profondes. On l’observe assez éloigné des berges de son plan d’eau. Les adultes ajoutent parfois à leur menu de petits mollusques et de petits poissons, surtout sur leurs aires d’hivernage. Les canetons, moins habiles à plonger, se nourrissent en surface.

Ce canard niche de préférence dans les cavités d’anciens nids de Pics flamboyants ou de Grands Pics. Le choix du territoire de nidification dépend donc de la présence d’arbres de grand diamètre, que ces espèces choisissent de préférence pour y creuser leur nid : le peuplier, l’érable, le bouleau, le caryer, ou des chicots de ceux-ci. Il s’accommode aussi des nichoirs installés dans des milieux propices.

Il installe son nid à une distance de 20 à 100 m, et parfois plus, du plan d’eau qui lui sert de territoire d’alimentation. Ce nid n’est garni que de duvet que la femelle renouvelle tout au long de la couvaison. En général, il y a de 6 à 10 œufs pondus au rythme d’un par jour. La couvaison commence à la ponte du dernier œuf et dure environ 30 jours.

Les canetons éclosent presque tous en même temps et à peine un jour plus tard ils quittent le nid, guidés par la femelle, qui les amène sur le plan d’eau où ils se développeront. La femelle s’occupe seule des canetons pendant 5 ou 6 semaines. Ils atteignent leur taille adulte et sont prêts à l’envol au bout d’une cinquantaine de jours. Ce n’est qu’à deux ans qu’ils acquièrent maturité sexuelle.

Répartition et migration

L’aire de nidification du Petit Garrot est essentiellement canadienne, de notre frontière sud jusqu’à la limite nord des grands arbres, des Rocheuses jusqu’au Québec. L’ouest du Québec en forme la limite orientale. Seule une partie de l’Alaska jouxtant le Yukon et le nord de L’Idaho et du Montana constituent la partie étatsunienne de l’aire.

Le Petit Garrot nous arrive en avril et nous quitte vers la fin septembre ou en octobre. Comme pour d’autres espèces, si les conditions météo sont propices, certains individus prolongent leur séjour jusqu’en décembre.

L’hiver, il se retire dans la partie des États-Unis où les eaux demeurent libres de glace, là où il peut s’alimenter. On le retrouve aussi dans le nord du Mexique à cette période de l’année.

Dans la région montréalaise, où ont été prises les photos accompagnant ce texte, on ne peut l’observer en petits groupes qu’en période migratoire, surtout au printemps.

Abondance et tendances

Le Petit Garrot serait relativement abondant sur l’ensemble de son territoire. Peu commun au Québec, son aire serait en extension et sa population en croissance selon le Deuxième atlas des oiseaux nicheurs du Québec méridional publié en 2019.

Selon l’Union internationale de la conservation de la nature (UICN), jusqu’à présent, l’espèce ne présenterait pas de préoccupation significative, ce qui est une bonne nouvelle dans ces temps où beaucoup d’espèces aviaires sont en déclin, sinon carrément menacées.

Nul besoin d’insister : si, lors de vos promenades en nature, vous en croisez quelques-uns, prenez bien le temps de les observer, ils en valent la peine.

Ce texte de notre chroniqueur Jean Poitras a été publié dans la version imprimée du Journal des voisins, le Mag papier de décembre 2022, à la page 28. Vous pouvez également lire sa chronique sur le Garrot à œil d’or, parue en octobre 2022. 



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