Pauline Wolff, urbaniste à l’Université de Montréal, croit que le temps est le meilleur allié des grands changements, comme ceux attendus sur le boulevard Henri-Bourassa.
Journal des voisins: Pourquoi faire un changement aussi radical sur le boulevard Henri-Bourassa?
Pauline Wolff: Certaines choses planifiées dans les années 1950 et 1960 ne fonctionnent plus. Ce qui justifie de faire une révolution des différents modes de transport, c’est de prendre des décisions de façon centralisée. Henri-Bourassa est une autoroute urbaine. Il est impossible de ne pas toucher à cet axe-là.
D’où vient la résistance aux changements sur Henri-Bourassa?
En ce moment, il y a une polarisation incroyable dans la société. Des élus reçoivent même des menaces de mort! C’est sûr que nous sommes à un moment de transition dans la ville et il y a deux modes de vie qui s’affrontent. Mais je trouve que cette polarisation, c’est l’arbre qui cache la forêt. La forêt en arrière, c’est tout ce qui justifie de réaménager des axes majeurs aux cœurs des quartiers, des axes de transit, des lieux incroyablement dangereux dans lesquels se produisent des accidents terribles.
Le rejet populaire peut-il menacer le projet?
Il faut quand même souligner qu’en ce moment, c’est un très petit groupe de gens qui fait énormément de bruit. Les gens s’insultent, menacent de mort, se font sortir des conseils d’arrondissement. On est quand même rendu loin, parce qu’on supprime quelques cases de stationnement et qu’on fait des pistes cyclables. Si la majorité silencieuse s’exprimait davantage, on se rendrait compte qu’il y a quand même beaucoup de gens contents de ce qui est en train d’arriver.
Est-ce qu’avec le temps ces changements seront mieux acceptés?
Au début, les gens sont fâchés. Mais une fois que les habitudes ont changé, cela devient du quotidien et ce n’est plus source de haine et de rage. J’ai un exemple qui me concerne. J’ai grandi à Strasbourg. Dans les années 1990, le tramway est apparu dans ma rue. Je me souviens de discussions enflammées avec mon père qui hurlait que c’était honteux, qu’on ne pourrait plus se déplacer. Effectivement, c’était très dur à vivre. Maintenant, à 75 ans, il est ravi de pouvoir montrer dans un transport silencieux, qui l’emmène en toute sérénité au centre-ville.
En attendant, comment faire accepter la transition?
Il faut amener la population à se projeter dans quelque chose de positif pour qu’elle soit capable de vivre les situations négatives temporaires, parce que tôt ou tard, les choses s’amélioreront.
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