Jean Beaudet conseil d'arrondissement
Jean Beaudet s’exprimant devant les élus de l’arrondissement Ahuntsic-Cartierville. (Photo: Amine Esseghir, JDV)

L’implantation du corridor de mobilité durable sur le boulevard Henri-Bourassa vole la vedette au conseil d’arrondissement du 6 mai. Les opposants au projet venus en nombre veulent toujours faire entendre leur voix. La situation engendre une tension inhabituelle lors de cette réunion mensuelle. Par ailleurs, des citoyens favorables au projet, forts de leurs arguments en faveur du Service rapide par bus et des pistes cyclables à venir sur cette artère, prennent aussi la parole.

Face au nombre important de citoyens inscrits pour intervenir au sujet du corridor de mobilité durable, la présidente de séance, Emilie Thuillier, mairesse d’Ahuntsic-Cartierville, limite très vite le nombre de questions à trois, selon les règles de régie interne. Décision qui suscite le mécontentement des opposants au projet.

Jean Beaudet, résident d’Ahuntsic, s’interroge sur l’importance de la démocratie dans la gestion des affaires publiques dans l’arrondissement.

« Je suis tellement content d’entendre que vous avez consulté la population pour une placette [pour] 40 personnes », indique-t-il, non sans sarcasme. Il regrette dans le même temps que les citoyens n’aient plus la possibilité de s’exprimer sur le corridor de mobilité durable après la soirée d’information du 7 décembre 2023.

Pour lui, c’est un déni de démocratie. Il déplore aussi l’impossibilité pour les citoyens de recourir dorénavant au droit d’initiative en consultation publique, prévu par les règlements de la Ville. Le droit d’initiative permet aux citoyens d’organiser eux-mêmes une consultation publique quand ils jugent qu’ils n’ont pas été entendus sur un projet qui les concerne.

Pour Emilie Thuillier, au-delà des consultations publiques, le projet de corridor de mobilité durable sur Henri-Bourassa fait partie des propositions de la formation politique à laquelle elle appartient avec la mairesse de Montréal et qui constitue aujourd’hui, démocratiquement, la majorité à l’Hôtel de Ville.

«C’est un engagement phare de Valérie Plante», martèle-t-elle, rappelant que le parti Projet Montréal a remporté les suffrages et une majorité de citoyens a avalisé ses promesses.

«Nous avons proposé un programme pour donner plus de place aux déplacements actifs et collectifs», rappelle la mairesse d’Ahuntsic-Cartierville. «Une approche mondiale», souligne-t-elle.

Pour

Luc Audebrand, en appui au projet, veut, dit-il, ajouter son nom à ce qu’il appelle la majorité silencieuse en faveur du corridor de mobilité durable. Il énumère un chapelet de critiques pour décrire les conditions difficiles sur le boulevard Henri-Bourassa dans sa configuration actuelle. «Il coupe les quartiers en deux», «c’est une piste de course en soirée», «plus au service des Lavallois ».

«Traverser le boulevard est un parcours du combattant pour les personnes à mobilité réduite», assène-t-il.

Il est convaincu qu’avec le corridor envisagé, l’artère sera «au service de l’ensemble de la population», incluant les cyclistes et les piétons.

Ce qui fâche

Cet été, à Ahuntsic-Cartierville, sera réalisé le tronçon du corridor de mobilité durable sur le boulevard Henri-Bourassa, entre l’avenue Marcelin-Wilson et la rue Lajeunesse. La Ville interdira complètement le stationnement sur cette artère. Elle veut tracer deux pistes cyclables, une par direction. Elles s’intégreront au Réseau express vélo (REV). Montréal veut aménager aussi une voie par direction pour les autobus du type Service rapide par bus (SRB) et laisser deux voies par direction pour les autres véhicules.

Jean Beaudet avertit qu’il n’y aura plus qu’une seule voie si on considère les couloirs de circulation pour les virages à droite et à gauche.

Mme Thuillier soutient que les détails devraient être connus le 28 mai lors d’une soirée d’information sur les travaux. «Il y a au niveau de certaines intersections des mailles de béton fermées [qui interdisent les virages à gauche]. La circulation devrait être comme elle l’est actuellement [deux voies par direction]», sur de bonnes distances.

Voies sur Henri-Bourassa
Les vélos et les bus auront chacun une voie réservée par sens de circulation. Les autos et les camions auront deux couloirs dans chaque direction. (Photo: courtoisie Ville de Montréal)

Oksana Kyyanitsya s’est demandé pourquoi ajouter deux pistes cyclables, une dans chaque direction, sur Henri-Bourassa alors qu’il y en a une plus au nord sur le boulevard Gouin et une autre au sud, sur la rue Sauriol.

Des pistes cyclables supplémentaires compliquent selon elle les déplacements en voiture.

«J’ai deux enfants que je dois emmener à l’école tous les jours. Avec ces pistes, c’est mettre plus de stress sur nos épaules.»

Mme Thuiller relève, pour sa part, que la piste sur Gouin date de plus de 40 ans et n’est pas du tout adaptée aux déplacements pratiques en vélo. Celle sur Sauriol dessert des parcs et des écoles et n’a donc pas la même vocation.

«Les pistes sur Henri-Bourassa se connectent au REV et rallient l’arrondissement Saint-Laurent», assure Mme Thuillier.

La Ville envisage, d’ici 2027, un boulevard Henri-Bourassa ,transformé en corridor de mobilité durable, reliant l’autoroute 40 au boulevard Lacordaire, sur une distance d’environ 18 km.

Ancienne promesse

Gilles Larocque, un habitué des conseils d’arrondissement, mentionne que si le projet sur Henri-Bourassa était effectivement inscrit dans le programme du parti Projet Montréal, ce qui est réalisé aujourd’hui est différent.

«Vous parliez de métrobus. Vous n’avez jamais parlé de cyclistes. Je ne suis pas d’accord.»

Mme Thuillier différencie le programme de la plateforme électorale.

«Nous n’avons rien changé. Il y a des engagements électoraux qui ont été réalisés», mentionnant au passage le Réseau express vélo (REV) sur Lajeunesse, par exemple.

André Savoie, propriétaire notamment de la charcuterie Salaison Saint-André, une destination gourmande dans le secteur, confirme que le projet se trouvait sur la table au moment de la campagne électorale, avec toutefois une nuance.

«Je regrette, dit-il, mais il y avait aussi des voies de stationnement sur le plan.»

M. Savoie qui a dénoncé souvent ce qu’il a appelé le manque d’écoute des élus, se place plutôt du côté de ceux qui sont favorables au projet. Cependant, il s’inquiète de la vitalité commerciale de la rue et souhaite que des mesures pérennes soient prises pour faciliter les livraisons et l’accès des clients automobilistes aux commerces.

«C’est un projet qui s’implante rapidement», relève Nathalie Goulet, conseillère de Ville d’Ahuntsic.

Elle est intervenue pour que la Direction de l’urbanisme et de la mobilité de la Ville de Montréal parle avec lui et évalue la possibilité de créer des débarcadères et des zones de stationnement.

Opportunité

Samuel Millette Lacombe, en faveur du projet, a souligné que dans sa petite famille, avec deux jeunes enfants, il n’y a pas d’auto.

«Henri-Bourassa, c’est très hostile dès qu’on est en dehors d’une voiture», constate-t-il, une situation qui agit comme repoussoir notamment pour les gens du coin.

«Nous aimons bien les bagels, mais on va les acheter sur le Plateau alors qu’il y a Bagels Henri-Bourassa pas loin », illustre-t-il.

Les espaces plus favorables aux vélos et aux piétons devraient, selon lui, constituer une occasion d’affaires supplémentaire.

«Ce corridor permettra au voisinage de redécouvrir le secteur en offrant un meilleur accès aux commerces.»



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Rogers Annie
Rogers Annie
7 Jours

Pour ma part, je suis en faveur du projet. Je m’étonne que certaines familles avec de jeunes enfants n’appuient pas ce genre d’initiative. Quand j’étais enfant, mes parents ne m’ont jamais reconduite à l’école en auto! J’allais à pied ou à vélo. Les enfants et les ados ont perdu beaucoup d’autonomie avec la culture de l’automobile et les grands boulevards hostiles au transport actif. Je crois que les jeunes pourront recommencer à se déplacer par leurs propres moyens avec ces améliorations sur HB!

jean paul dubreuil
jean paul dubreuil
4 Jours

Le projet de réaménagement du Boulvard Henri Bourassa prévoit deux pistes cyclables à sens unique vers l,est et l,ouest , l,une du coté nord et l,autre du coté sud .

Il y a deja deux pistes cyclables toute proches ,celle du Boulvard Gouin et celle de la rue Prieur.Au total il y aura donc 4 pistes cyclables parallèles dans un corrider d,environ quelques dizaines de mètres.

Sans compter la piste de la rue Sauriol ( parallèle est -ouest) a environ 500 mètres au sud.

Un cycliste qui habite entre Gouin et Sauvé pourra donc utilser 5 pistes cyclables pour aller dans la direction est- ouest, Chacune de ces 5 pistes connectent sur les pistes nord sud de Christophe Colomb et Lajeunesse.

Il est vrai que la piste Gouin n,est pas aux normes d,une circulation rapide et sécuritaire, mais c,est quand même une piste agréable pour les cyclistes de loisirs et ceux qui ne sont pas pressés

.Les pistes de Prieur et de Sauriol sont quant à elles parfaitement sécuritaires pour les cycliste qui se déplacent rapidement pour se rendre au travail ou aux études ou au metro Sauvé..

La solution que je propose est de faire une seule piste cyclable unidirectionelle sur Henri Bourassa et d,utiliser la piste de Prieur pour l,autre direction, deux pistes parallèles sur deux rues différentes cela se fait ailleurs a Montréal et cela ne dérange en rien les cyclistes.

Cette formule seraient plus acceptables au commercants, aux résidents des environs, aux automobiliste sans rien enlever aux cyclistes ni aux autobus..

De plus, une piste de moins couterait moins cher aux contribuables.

Jean Paul Dubreuil .

Charles Reny
Charles Reny
3 Jours
Répondre à  jean paul dubreuil

Ce sont de bons arguments. Pour être passé par Paris, il y a quelques années, j’ai vue à quel point, l’élargissements des trottoirs rendaient les boulevard tellement agréable à vivre. Ce n’est pas le cas présentement de Henri-Bourassa qui est, convenons en, une autoroute à 8 voies, un no mans land pour tout les humains qui ne circulent pas en voiture. Bien que perfectible, le projet aura le mérite de changer l’ambiance. Si j’avais à investir en immobilier, c’est sur HB que je le ferais. Avec ce projet, débute une revitalisation de cette artere.

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