Bonne nouvelle pour les habitants d’Ahuntsic-Cartierville: l’Hôpital du Sacré-Cœur-de-Montréal va enfin se doter d’un appareil d’examens TEP-CT. La pénurie de technologues en médecine nucléaire capables de faire fonctionner ces outils reste toutefois préoccupante. La seule formation spécialisée en ce domaine au Québec est pourtant offerte au Collège Ahuntsic.
Vous n’avez jamais entendu parler de médecine nucléaire? Cette spécialité au nom quelque peu ésotérique est pourtant devenue indispensable.
Il s’agit en effet d’un outil de diagnostic non invasif très performant et utilisé pour diagnostiquer des centaines de pathologies. Parmi elles, les maladies cardiovasculaires, les cancers ainsi que des affections neurologiques (Alzheimer, Parkinson, etc.) ou respiratoires.
Sa particularité: exploiter les propriétés d’éléments radioactifs afin d’obtenir des images très précises de l’intérieur du corps humain en trois dimensions. Un véritable tournant dans l’histoire de l’imagerie médicale.
À l’Hôpital du Sacré-Cœur-de-Montréal, l’absence de caméra TEP-CT (tomographie par émission de positrons), devenue le standard de référence en la matière, appartiendra bientôt au passé.
20 millions $
Après des années de tractations, l’hôpital a finalement obtenu l’autorisation du ministère de la Santé pour son projet de modernisation de la médecine nucléaire, comprenant l’achat d’une TEP-CT.
Il s’agit d’un investissement d’environ 20 millions $, dont 1,6 million $ proviennent de l’établissement et 3 millions $ de la Fondation de l’Hôpital du Sacré-Cœur. C’est un cap important pour la prise en charge des patients.
«Jusqu’à présent, on a une entente avec le CHUM [Centre hospitalier de l’Université de Montréal] pour utiliser ses équipements deux jours par semaine. On doit donc sélectionner les patients, car les places sont limitées. Cela demande aussi d’envoyer nos technologues et de transférer les patients hospitalisés par ambulance, ce qui est loin d’être idéal», confie le Dr Mathieu Charest, chef du service de médecine nucléaire de l’Hôpital du Sacré-Cœur.
Il faudra tout de même être patient… Lancés au printemps dernier, les travaux devraient s’étendre jusqu’à la fin de l’année 2024, pour une mise en service prévue au courant de 2025. Le nouveau bâtiment de 1 600 m2 accueillera non seulement une nouvelle caméra TEP-CT, mais également un laboratoire pour la préparation des matières radioactives, cinq salles d’injection, une salle d’attente et un secrétariat.
Pour faire fonctionner cette TEP-CT à cinq anneaux, renommée être la plus performante sur le marché, l’hôpital devra en outre recruter des technologues spécialisés en médecine nucléaire. On estime qu’il en manque 60 au Québec et qu’il en faudrait 60 additionnelles dans les années à venir. Le service compte sur son partenariat avec le Collège Ahuntsic.
Formation unique
Le Collège Ahuntsic est le seul cégep de la province à former une quinzaine de diplômés chaque année depuis 55 ans. «Il s’agit d’une formation théorique assez intense sur deux ans, suivie d’un stage d’un an. On a un projet de délocalisation de cette formation à Québec afin de former davantage de technologues en médecine nucléaire», explique Mathieu Dallaire, enseignant et responsable de la coordination du programme Technologie de médecine nucléaire au Collège Ahuntsic.
Les étudiants apprennent à gérer et à préparer les matières radioactives de façon sécuritaire avant l’injection au patient, et à utiliser les machines pour garantir le résultat de l’examen. «On offre également des cours de psychologie afin de les préparer à gérer les patients claustrophobes, par exemple, ou encore les relations avec leurs collègues», précise l’enseignant.
Grâce à un financement de 2 270 000 $ provenant du ministère de l’Enseignement supérieur, trois nouveaux appareils TEP-CT permettent aux étudiants de s’exercer dans des conditions réelles.
«Ce sont les mêmes machines qu’ils retrouveront en milieu hospitalier. Nous avons deux mannequins creux, Francis et Christian, dans lesquels on place des organes factices imprimés en 3D. Ils sont vides afin que les élèves puissent y injecter les produits et faire des images», souligne Mathieu Dallaire.
Le programme est apprécié par les étudiants. Pour Anjali, «la médecine nucléaire est une très belle option» qui lui permettra de trouver du travail partout, «y compris à l’international».
«On apprend quelque chose de pas commun, on est dans la santé sans être dans le dur, et le taux de placement est très bon», confirme sa camarade Laeticia.
Si leur avenir professionnel semble assuré, le salaire reste cependant une ombre au tableau. «Non seulement le stage de dernière année n’est pas rémunéré, mais les salaires ne sont pas à la hauteur. Le métier de technologue est bien mieux reconnu à l’étranger et c’est un point crucial si l’on veut sortir de la pénurie qui perdure depuis de nombreuses années», conclut Mathieu Dallaire.
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