La semencière Lyne Bellemare, au temps des récoltes. (Crédit-photo: Katia Konioukhova)

Alors que, depuis quelques semaines, plusieurs d’entre vous ont déjà mis en pot des semences, dans leur salon ou leur sous-sol, en prévision des plantations en pleine terre dans votre potager ou sur votre balcon d’ici quelques mois, Journaldesvoisins.com a pensé vous présenter de nouveau un portrait de l’’Ahuntsicoise Lyne Bellemare. Mme Bellemare est l’une des quelque douze semencières au Québec qui conserve et protège des semences écologiques de variétés potagères rares ou en voie d’extinction.

Pour Lyne Bellemare, tout a commencé lorsqu’elle a été mise à la porte du jardin communautaire de la Ville…

Comme plusieurs Montréalais, Lyne Bellemare aime jardiner. Elle a appris par essais et erreurs, en discutant avec les gens du jardin communautaire qu’elle fréquentait.

Dans le but d’économiser de l’argent, Lyne Bellemare a voulu récolter ses propres semences. Elle avoue que ses premières tentatives ont été un vrai fiasco.

« J’ai donc posé beaucoup de questions, mais les gens ne savaient pas (comment faire). Tout le monde achetait ses semences dans des magasins de grande surface. J’ai réalisé qu’on a perdu le savoir-faire, les techniques. »

En 2009, afin d’en apprendre davantage sur l’agriculture, elle fait de la traduction bénévolement auprès de Semences du Patrimoine Canada, puis en est devenue coordonnatrice du volet francophone.

La curiosité paie!

Curieuse, elle essaie la permaculture, une technique qui prend en considération la biodiversité de chaque écosystème.

« On me trouvait un peu bizarre. Je voulais mettre de la paille, des copeaux de bois, mais ils [les gens du jardin communautaire] pensaient que ce n’était pas propre. En laissant mes laitues monter en graines, ils pensaient que j’avais abandonné le jardin. Mais je voulais seulement savoir à quoi ressemble une graine de laitue! », explique l’agricultrice en devenir.

Ce fut la fin de sa participation aux jardins communautaires.

« Je suis devenue persona non grata! » dit-elle en riant. « Mais ç’a été la meilleure affaire qui pouvait m’arriver! »

En fait, Mme Bellemare n’aurait jamais cru que sa passion se transformerait en entreprise, Terre promise, et qu’elle aurait même des employés.

Maintenant, chaque jour, elle se lève à l’aube pour travailler sur une terre de 13 hectares à L’Île-Bizard, qu’elle partage avec dix autres agriculteurs et apiculteurs.

Cette année, Lyne Bellemare cultive plus de 18 variétés sur le petit lot de terre, surtout dans le but de récolter et préserver les semences.

Elle pratique la permaculture et elle fait tout à l’ancienne.

« On n’utilise pas de «Weedeater» (coupe-herbe); j’utilise une faux », dit-elle fièrement. « En tout cas, je ne gaspillerai plus jamais un légume, parce que je sais à quel point c’est du travail les faire pousser. »

Graines du patrimoine

Elle a développé un intérêt pour les semences rares du patrimoine, puisqu’elle sait que trop de variétés n’ont pas été bien conservées et ont disparu à jamais.

« Le gouvernement paie pour des monuments et pour le patrimoine, mais pas pour les légumes du patrimoine », se désole-t-elle.

« Les semences qu’on offre, c’est un chaînon. Cette semence a été cultivée presque chaque année depuis des temps! Si ce chaînon est perdu, c’est fini », dit Mme Bellemare, qui ajoute qu’elle est l’une de deux personnes dans la province qui a des semences de la gourgane Petite du lac et la gourgane de Charlevoix. « Si on ne les offre plus, elles disparaîtront à jamais. »

Maintenant, Lyne Bellemare reçoit régulièrement des dons de semences pour lesquelles elle prend en note l’historique et l’origine.

« Le plus triste, c’est quand on reçoit une enveloppe de semences rares qui sont mortes. On n’a même pas pu essayer de les faire vivre. »

Elle a ensaché ses premières semences dans une petite pièce de son condo.

« J’ai bien vu qu’il me fallait plus d’espace », dit-elle, en ajoutant que le garage dans sa nouvelle demeure à Ahuntsic-Cartierville est désormais son petit atelier.

C’est dans ce petit espace qu’elle rapporte ses semences de L’Île-Bizard, les trie et les assèche.

À l’automne, elle fait des tests de germination, puis ensache les semences qui ont passé le test.

En, hiver, Lyne Bellemare fait la tournée des fêtes des semences et des plantes et anime plusieurs conférences pour partager ses connaissances et sa passion.

Héritage

Lyne Bellemare ne prétend pas vouloir faire de l’agriculture à grande échelle. Son rôle en est un de conservation du patrimoine agricole.

La semencière souhaite aussi un jour léguer ses semences et son savoir-faire à ses quatre enfants.

« Auparavant, lorsque les gens se mariaient, ils emportaient avec eux une tasse de semences. L’agriculture se transmettait de génération en génération.»

Entre temps, elle enseigne à sa fillette comment compter… en utilisant des graines de haricot!

Ce texte a été d’abord publié dans le mag papier du jdv en septembre 2017.

Vous vous intéressez à ce sujet ? Ne manquez pas notre mag papier d’avril en distribution sur tout le territoire depuis vendredi 19 mars 2021.



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Michelle Clément
Michelle Clément
3 Années

Merci pour ces informations qui vont nous permettre de reconnaître la valeur des semences. Bravo aussi à Mme Bellemarre pour sa foi, sa persévérance et aussi sa curiosité. Xx

Jocelyne Grenier
Jocelyne Grenier
3 Années

C’est touchant de voir le parcours pris par certaines personnes face à des contrecoups de la vie.
Mme Bellemare a su rebondir et ensuite se documenter et transmettre ses connaissance pour enrichir les nôtres.
Elle est un bel exemple de résilience.

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