Une simulation du projet Héberjeune: des logements sociaux pour jeunes prévus rue Péloquin à Ahuntsic. (Photo: courtoisie Héberjeune)

La construction prochaine d’un bâtiment de logements sociaux destinés à de jeunes adultes a créé la polémique à Ahuntsic. Malgré la réunion publique et les explications du directeur d’Héberjeune, l’organisme porteur du projet, certains habitants restent inquiets. Dérogations, référendum, stationnement… le Journal des voisins fait le point.

À Ahuntsic-Cartierville, le projet de 18 logements sociaux porté par Héberjeune fait encore jaser. «Je n’ai pas signé la pétition en ligne mentionnée dans l’article, comme je ne partage pas la peur de certains résidents envers des personnes en réinsertion sociale. Je suis cependant en communication avec certains de mes voisins, comme nous essayons ensemble de maintenir des relations de bon voisinage et partageons l’opinion que ce dossier n’a pas été géré de façon transparente», témoigne l’une de nos lectrices résidant dans la rue Péloquin, où sera implanté le projet communautaire.

Hauteur du bâtiment, nombre de logements, manque de communication de la part de l’arrondissement, rétropédalage sur la possibilité d’un référendum et stationnement sont au cœur des inquiétudes de certains citoyens.

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Nathalie Goulet, conseillère du district d’Ahuntsic pour Projet Montréal. (Photo: François Robert-Durand, archives JDV)

Le Journal des voisins a décidé de poser toutes ces questions à Nathalie Goulet, conseillère de la Ville du district d’Ahuntsic, pour éclaircir les dernières zones d’incompréhension.

Pourquoi les voisins du projet n’ont pas reçu de communication pour les avertir du projet?

Parmi ceux qui s’inquiètent de l’installation du projet social près de chez eux, nombreux sont ceux à dénoncer un manque de communication et auraient souhaité recevoir un avis. Pourtant la publicisation des projets dans l’arrondissement est soumise à un processus.

«On fait toujours comme ça. On commence par installer une pancarte sur le terrain et on publie un avis public sur le site internet de l’arrondissement. Il n’y a pas de courrier envoyé à chaque citoyen. D’ailleurs ces gens ont forcément été informés d’une manière ou d’une autre puisqu’ils s’y opposent. Je pense que ces résidants veulent aller chercher des failles techniques car ils sont contre le projet, mais nous savons que nous sommes en règle. On peut évidemment toujours s’améliorer, et nous menons d’ailleurs une consultation au sujet du règlement d’urbanisme [NDLR: le Journal des voisins en avait parlé ici], donc on invite les citoyens à s’exprimer», affirme Nathalie Goulet. Une consultation publique avait par ailleurs fait salle comble, en présence d’élus et du directeur d’Héberjeune.

L’élue s’étonne du retentissement de ce projet. «C’est un projet comme il y en a beaucoup dans l’arrondissement. Des résidences telles que celles-là existent déjà et se sont implantées sans faire de bruit», souligne-t-elle.

Pourquoi le projet a été présenté à deux reprises en comité consultatif?

Oumar Gueye, directeur général de l’organisme communautaire Héberjeune. (Photo: courtoisie Héberjeune)

Le projet soumis par Héberjeune a été présenté une première fois en janvier 2023, puis en août 2023. «Nous avons émis un avis préliminaire le 11 janvier, puis un avis favorable le 14 août. Il faut savoir que c’est courant et qu’il peut y avoir plusieurs allers-retours entre l’arrondissement et les porteurs, pour certains projets», explique Nathalie Goulet.

Lors d’une précédente entrevue, le directeur de l’organisme communautaire Héberjeune, Oumar Gueye, avait confié que certains éléments du dossier (nombre de logements, nombre d’étages…) avaient en effet été modifiés suivant la première présentation. Il a ensuite été présenté une nouvelle fois en comité, afin d’obtenir un avis favorable en se pliant aux règlements de l’arrondissement.

Pourquoi certaines dérogations au règlement d’urbanisme ont-elles été accordées?

Au total, cinq dérogations au règlement d’urbanisme de l’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville ont été accordées pour ce projet. La plus polémique, sans doute, est celle qui autorise une construction de 3 étages au lieu de 2 maximum, et une hauteur de 12 mètres, soit 2 mètres de plus que la limite règlementaire.

«Ajouter un étage supplémentaire est une décision importante, donc on y a réfléchi longuement. Au final, le troisième étage est déporté sur le côté qui donne sur le boulevard Henri-Bourassa, tandis que la partie sur la rue Péloquin compte deux étages avec l’entrée principale. Ça reste un bâtiment à taille humaine qui ressemble à un duplex et qui va bien s’intégrer dans la rue. On aurait pu avoir quelque chose de bien plus massif si ça avait été un promoteur privé», estime l’élue.

Concernant le nombre de logements, qui sera de 18, l’arrondissement assure qu’il s’agit du nombre minimal requis pour assurer la viabilité du projet. Héberjeune prévoyait, à l’origine, un bâtiment de 23 appartements, avant de revoir ses prétentions à la baisse.

Le taux d’implantation (rapport existant entre l’implantation d’un bâtiment et la superficie du terrain sur lequel il est construit), qui ne doit pas dépasser les 50 %, a également fait l’objet d’une dérogation. Il sera finalement de 55 %. «On ne peut pas dire que ce soit une dérogation importante; c’est une légère augmentation», indique Nathalie Goulet.

Enfin, la distance minimale de 1,2 mètre des balcons avec le bord du terrain n’est pas respectée elle non plus. Selon l’arrondissement, cela a été rendu possible du fait que les balcons donnent sur une ruelle, et non sur une rue passante.

Pourquoi la possibilité d’un référendum a-t-elle été annoncée avant la publication d’un erratum écartant cette possibilité?

«Nous avons été très surpris. De toute bonne foi, on pensait que le processus régulier s’appliquait, puis on a appris que le gouvernement du Québec venait d’adopter le projet de loi 16 qui soustrait les projets de logements sociaux de l’approbation référendaire», atteste Nathalie Goulet.

La loi 16 exempte en effet du processus d’approbation référendaire certains projets. Parmi eux, la construction de nouveaux logements sociaux ou de bâtiments municipaux (caserne de pompiers, usine de traitement des eaux usées…). Cette loi provinciale vise à faciliter la densification et à éviter qu’un petit nombre de résidents puisse paralyser des projets d’intérêt public. «L’arrondissement n’avait d’autre choix que d’appliquer la loi», assure l’élue.

À Ahuntsic-Cartierville, le dernier référendum a été organisé en 2016. Il s’agissait de consulter la population au sujet du projet d’occupation de l’emplacement localisé au 406, rue Legendre Ouest, à des fins de lieu de culte, d’activités communautaires ou socioculturelles et d’école d’enseignement spécialisé. Près de 16 000 $ avaient été nécessaires à sa tenue. Résultat: le NON l’avait emporté à 60 %, conduisant à l’avortement du projet de création d’une mosquée.

La loi ayant changé depuis, le projet porté par Héberjeune verra bel et bien le jour. Les travaux doivent démarrer début 2024, pour se terminer à la fin de la même année. Nathalie Goulet invite les citoyens à venir rencontrer les jeunes qui s’y installeront et espère qu’une «belle cohabitation» naîtra. «Ces jeunes ne seront pas à la rue, et c’est ce qu’il faut retenir», conclut-elle.



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