Une souris près d’un logement dans Ahuntsic. (Photo: François Robert-Durand, JDV)

Depuis très longtemps, l’insalubrité est l’un des problèmes majeurs auxquels sont confrontés les locataires à Ahuntsic-Cartierville.

Cet article est paru dans la version imprimée du Journal des voisins,
le Mag papier de juin-juillet 2023,
à la page 24.

Année après année, le constat est le même: trop de gens se plaignent et reçoivent peu de réponses. Pourtant, la Ville et, par extension l’arrondissement, ne semble pas rester les bras croisés devant ce qui s’apparente à un drame.

Emilie Thuillier, mairesse d’Ahuntsic-Cartierville, ne cache pas son enthousiasme. Pour elle, la Ville prend le problème de l’insalubrité des logements à bras le corps. «Je suis vraiment fière de notre administration parce qu’on a travaillé très fort et on y arrive. L’objectif est d’agir en amont. La mesure s’appelle la certification propriétaire responsable», indique Mme Thuillier. Cette certification, renouvelable tous les cinq ans, représente un permis pour les propriétaires, privés ou publics, afin de pouvoir louer des logements. Au moment d’écrire ces lignes, on nous confiait que cette mesure devrait entrer en vigueur en juin.

Quartier St-Simon vu des immeubles de Chabanel (Photo : jdv - Philippe Rachiele)
Quartier Saint-Simon vu des immeubles de Chabanel. (Photo: Philippe Rachiele, JDV)

Les premiers visés seront les bâtiments de 100 logements et plus. Puis, au fil des ans, d’autres catégories d’immeubles seront concernées pour qu’en 2027, tous les immeubles locatifs de huit logements et plus disposent de cette certification. Les propriétaires qui n’auront pas obtenu cette certification, ou qui la perdront après une inspection, seront passibles de contraventions salées. Elles pourront être appliquées à répétition si la situation perdure. Les propriétaires devront aussi rendre publics les montants de loyers qu’ils pratiquent.

Par ailleurs, la Ville a mis en place, pour les immeubles fortement insalubres, un avis de détérioration de logement. C’est un registre public qui permet de savoir qu’un bâtiment malsain ne peut être habitable. Montréal a aussi donné plus de muscle au Règlement sur la salubrité, l’entretien et la sécurité des logements en 2022. Elle a adopté également un nouveau texte en mai cette année, sur l’occupation et l’entretien des bâtiments.

Un problème endémique

Outre des dispositions connues pour des habitations correctement entretenues et viables, le nouveau règlement vise les bâtiments vacants. Ils doivent être enregistrés comme inoccupés, éclairés à l’extérieur, entretenus, accessibles et leur température intérieure doit être maintenue à l’année à 10 degrés Celsius minimum. Les dispositions donnent aussi des pouvoirs aux inspecteurs qui peuvent visiter, prendre des mesures ou photographier les immeubles. En cas de non-respect des dispositions de ce règlement, les amendes peuvent atteindre des montants aussi élevés que 250 000 $ dans le cas de bâtiments patrimoniaux.

La situation des logements insalubres a donné lieu à la publication en 2017, par le Comité logement Ahuntsic-Cartierville (CLAC), d’un rapport intitulé «Zoom sur l’insalubrité», qui avait fait grand bruit. C’était une étude de onze mois dans la zone de revitalisation urbaine intégrée (RUI) Laurentien-Grenet, à Cartierville. Pas moins de 789 ménages avaient été visités et au moins 46% d’entre eux disaient vivre avec des problèmes de moisissures, de coquerelles, de souris, de punaises de lits ou d’absence de chauffage.

La ruelle verte entre la rue Michel-Sarrazin et le boulevard Salaberry. (Photo: François Robert-Durand, archives JDV)

Cette année, deux intervenants, l’un de Prévention du crime Ahuntsic-Cartierville, qu’on appelle communément Tandem, et un autre représentant du CLAC frappent aux portes des résidents des immeubles de six logements et plus pour établir une cartographie de l’insalubrité la plus précise possible dans tout l’arrondissement. Cette opération coûte près de 30 000 $ à l’arrondissement.

Plus de constats, mais quels résultats?

L’insalubrité donne beaucoup de travail au CLAC qui intervient auprès de locataires, souvent désemparés, pour les aider à exercer leurs recours. Ceux-ci sont souvent des immigrants, démunis, parlant peu le français ou l’anglais. Ils deviennent des proies faciles pour des propriétaires peu scrupuleux.

L’organisme soutient que les efforts sont insuffisants et déplore qu’on ne donne pas suffisamment de constats d’infractions pour poursuivre les propriétaires délinquants. «Notre vision c’est de faire en sorte que les locataires obtiennent un logement habitable le plus rapidement possible si leur logement est insalubre, parce que c’est leur qualité de vie qui en dépend. Malheureusement, on le sait, si on judiciarise tout de suite les dossiers, les propriétaires ne font plus rien tant que la procédure judiciaire n’est pas terminée», observe Mme Thuillier.

L’arrondissement a remis pour 2020-2021, 54 avis d’infraction, dont cinq cas vont devant la justice. En 2021-2022, ce sont 392 constats qui ont été donnés et deux causes devraient aboutir en cour. La mairesse est convaincue que cette façon de procéder est efficace dans de nombreux cas. «L’objectif, c’est que tout le monde s’entende et que les travaux soient faits. Lorsque l’arrondissement arrive avec un avis d’infraction, cela met de la pression sur le propriétaire», assure-t-elle. Elle convient toutefois que remédier au problème peut prendre un certain temps.

Ce texte fait partie du Dossier Logements du Mag de juin-juillet 2023,
duquel plusieurs autres articles sont reproduits.

1- Rareté des logements: locataires sous pression 

2- Les loyers sont chers à Ahuntsic-Cartierville

3- Loger à la bonne enseigne

4 – Le bonheur est dans l’impasse!



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